DEPUIS quelques années, les caisses de maladie allemandes effectuent de plus en plus souvent des « retaxations » à l’encontre des pharmacies, parfois pour des motifs futiles. Ce terme définit, en « allemand pharmaceutique » (voir encadré), le refus par une caisse de maladie de payer un médicament délivré par une pharmacie. Jusqu’en 2009, les retaxations n’étaient infligées qu’en cas d’erreur lourde ou de fraude manifeste. Aujourd’hui, au contraire, les caisses appliquent toutes les réglementations avec une efficacité que l’on qualifierait en France de prussienne. Il suffit qu’un pharmacien omette de cocher une croix ou fasse une erreur de date sur un formulaire pour que la caisse « retaxe » le médicament qu’il a, auparavant, délivré en tiers payant au patient. Il y a quelques années, une telle faute se traduisait, au pire, par une demande de précision de la caisse. De plus, les caisses « retaxent » souvent des médicaments sous contrats d’appel d’offres, si elles estiment que le pharmacien n’a pas respecté exactement ces derniers, même lorsqu’il avait de bonnes raisons d’agir ainsi.
Selon les pharmaciens, qui ont même établi un « palmarès » des caisses les plus zélées en matière de retaxations, ces sanctions sont pour elles une manière déguisée de réduire leurs dépenses, d’autant qu’elles frappent de préférence des médicaments chers. Certaines pharmacies se sont vues refuser des dizaines de milliers d’euros de factures pour des « erreurs » plus ou moins graves, et de nombreux procès encombrent les tribunaux avec, souvent, une victoire finale pour les caisses. En 2014, deux officines ont même dû déposer le bilan suite à de lourdes retaxations.
Libre choix.
Toutefois, il arrive que les pharmaciens gagnent, à l’image d’un procès tenu récemment à Darmstadt, qui a eu pour effet de réaffirmer le principe absolu de la liberté de choix de la pharmacie par le patient. Un patient était soigné en ambulatoire avec des médicaments cytostatiques, mais sa caisse avait exigé qu’il cherche ses médicaments dans une pharmacie spécialement agréée, en raison des conditions particulières de délivrance exigées par ces produits. En accord avec son oncologue, le patient avait toutefois demandé à son pharmacien habituel, lui aussi formé à la cancérologie, de lui délivrer ces médicaments, la pharmacie agréée par la caisse se trouvant à 50 km de chez lui. La caisse a considéré que ce pharmacien avait commis une faute en délivrant ces produits, et l’a « retaxé » pour un montant de 70 000 euros. Mais le tribunal a condamné la caisse à restituer cette somme au pharmacien, au nom du libre choix. Cette affaire renforce ainsi la position des officinaux face aux caisses, alors que certaines d’entre elles souhaitent mettre en place des réseaux de vente sélectifs, qui sont pour le moment interdits.
La guerre des retaxations pourrait toutefois s’apaiser dans les mois à venir. Le gouvernement prépare en effet de nouvelles mesures pour réduire les dépenses et moderniser le système de santé. Les syndicats de pharmaciens se mobilisent pour que le dossier des retaxations soit inclus dans cette réforme : ils demandent un encadrement de leur principe, beaucoup trop arbitraire, et des moyens de défense plus efficaces.
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