La question du risque d'ubérisation de l'officine semble une évidence pour « un marché qui pèse quelque 35 milliards d’euros, puisque le principe même de l’ubérisation nécessite un marché grand, mature, avec des phénomènes de concurrence organisée, et profitable », affirme Pascal Perri. Elle semble d’autant plus d’actualité que le monopole ne constituerait plus aujourd’hui un rempart infranchissable. Convaincue de la nécessité de réaliser des gains de productivité sur les services non exposés à la concurrence, « la Commission européenne entend bien mettre en tension les acteurs du secteur de la distribution pharmaceutique pour aboutir à une baisse du prix des médicaments qu’elle estime à 20 % au-dessus de ce que devrait être un prix raisonnable ».
Mais la menace ne viendrait pas que de Bruxelles. Selon l'économiste, « au moment où le parcours de santé se transforme, porté à la fois par le vieillissement de la population, par l’émergence de nouvelles technologies et par de nouvelles exigences économiques, les instances nationales s’interrogeront chaque jour davantage sur le coût de la santé ». Et donc se posera inéluctablement la question de la pérennité du modèle économique des 22 000 officines françaises qui constituent par ailleurs « un record européen ».
D’autant que, à l’instar d’autres marchés, la pharmacie est aujourd’hui confrontée au risque « vulca » (volatil, uncertain, complex, ambiguous). Le marché pharmaceutique est en effet par nature volatile, car soumis à des changements extrêmement rapides, brutaux et mortels. Il est par ailleurs confronté à une réelle incertitude, sans véritable clarté présente ni future, et à une certaine complexité, avec des clés de compréhensions multiples et changeantes. Il doit enfin faire face à une relative ambiguïté, puisque ni les amis, ni les adversaires n’étant clairement identifiés, la concurrence n’est pas correctement mesurée.
Digitalisation
Pas question pour autant d’abdiquer. Inspiré par la théorie américaine du SMAC (Social, Mobility, Analytic, Cloud), Pascal Perri préconise ainsi d’utiliser « les réseaux sociaux, qui sont les territoires de jeux des jeunes, en communiquant sur des outils mobiles et en recourant de plus en plus à des applications qui produiront de l’intelligence digitale et donc des données qui seront stockées dans des fermes informatiques ». C’est donc la digitalisation qui permettra aux officinaux de prendre leur avenir en main.
Mais pas seulement ! À l’instar des experts-comptables, les pharmaciens d’officine vont devoir prendre conscience de la valeur des conseils qu’ils proposent. C’est donc en accompagnant leur patient qu’ils quitteront leur statut de simple dispensateur de médicaments pour devenir des fournisseurs de services personnalisés. En clair ils passeront d’une logique quantitative à une logique qualitative pour circonscrire tout risque d’être remplacé demain. Cette évolution est constitutive d’une nouvelle chaîne de valeur, et ne saurait être compatible avec un modèle low cost qui, par nature, est un modèle simplifié basé sur une réduction de la profondeur de gamme et des prix bas. D’autant que « pour être low cost, il faut naître low cost » !
Ancien journaliste, Pascal Perri est un économiste spécialiste des modèles économiques low cost et hard discount. À la tête du cabinet européen spécialisé dans les politiques de prix et les stratégies low cost, PNC Economic, il a publié une quinzaine d’ouvrages et a rendu au ministre de l’Economie, en 2014, un rapport sur « l’impact social du numérique en France ».
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