« CE QUI M’INTÉRESSE, c’est le relief », précise avec gourmandise Frédéric Michel. Ce pharmacien de Moreuil (Somme) est subjugué lorsque, jeune étudiant, il découvre dans le grenier d’une amie un stéréoscope et des photos sur plaques de verre datant de la guerre de 1914. Il regarde dans la lumière cet instrument dans lequel deux images planes superposées par une vision binoculaire donnent une impression de relief. Depuis toutes ces années, et encore aujourd’hui, l’image en relief a été plus qu’une passion. La cave de sa maison est installée en studio de projection, il possède un grand nombre de DVD 3D (en trois dimensions), un équipement quasi professionnel. Visionner dans un tel confort Avatar, le premier film réellement conçu en 3D, est une expérience unique.
Frédéric Michel a commencé l’image modestement. Il a d’abord cherché à comprendre la technique visuelle de ces images de la Grande guerre : « On voyait les gens morts et vivants, en même temps. » La photo va le passionner, au point d’en arrêter (brièvement) ses études de pharmacie. Il achète deux appareils photos binoculaires Lubitel, format 6X6, « des appareils russes, lourds, un peu frustres, mais pas chers ». Il les monte en parallèle, reliés par une barre vissée, le tout posé sur un trépied, raccordé par un déclencheur souple. « En faisant deux photos simultanément, avec deux objectifs à 6,5 cm l’un de l’autre, l’écartement entre nos deux yeux, j’obtiens deux images, en principe identiques. Je les disposais côte à côte sur un carton, et je voyais une seule image, avec mes enfants en 3D. »
Le pharmacien est intarissable sur la technique, sur les différents plans qu’on doit travailler dans une image pour créer cet effet d’optique du relief. Il dit aussi avoir fait beaucoup de gymnastique des yeux pour réaliser ces images. Il dispose en fait d’une aptitude très singulière, « innée, et très travaillée » : ses deux yeux convergent, ou divergent, ensemble ou séparément, regardent l’un en haut, l’autre en bas. Il « louche » à volonté, comme il veut. Il « voit » le montage de deux images, avant de les monter.
Après les appareils russes, Frédéric Michel monte en gamme : des 6X6 Mamiya, du matériel RTB 3D (allemand), des appareils Nikon, pour diapositives, puis numériques. Plus des ordinateurs et les logiciels les plus pointus. Dans l’image 3D, il a connu tous les perfectionnements, un siècle de technique raccourci en deux décennies. C’est la technique qui le passionne : « Quand je pars en reportage, je me gave d’images pendant quinze jours, avec le numérique ce n’est plus cher du tout. J’aurais ainsi des mois de travail après. »
En diapositive, Frédéric Michel utilisait le format classique 24x36, mais sur des appareils adaptés : l’image 1 est prise avec la 3, puis la 2 avec la 4, la 5 avec la 7, etc. L’appareil numérique est aujourd’hui plus simple : un même boîtier, deux optiques, une seule commande, un seul réglage, un seul fichier.
« J’aime faire les plus belles photos, précise-t-il. Je veux bien comprendre les règles, connaître la technique, pour mieux travailler les photos. L’intérêt en 3D, c’est la succession des plans : d’abord le personnage, à 3,50 m, puis un arbre en second plan, un château en troisième, un ciel en arrière-plan. La prise de vue semble un peu plus longue à faire, moins instantanée, mais c’est très agréable. Le vrai plaisir, ensuite, est de travailler cette prise de vue sur l’ordinateur. J’aime recadrer, manipuler l’image. »
Frédéric Michel admet avoir une démarche plus technique qu’artistique. « C’est comme à la pharmacie, il faut être très professionnel. Ce que j’aime dans la photo, c’est la rigueur. » Son studio est aussi un summum de professionnalisme : les meilleures conditions pour revoir, par exemple, Titanic, l’autre succès mondial de James Cameron, refait en 3D. « Parce que nous avons deux yeux, nous voyons naturellement en relief », rappelle Frédéric Michel. Façon de rappeler aussi que la technologie 3D, pour nouvelle et futuriste qu’elle paraisse, nous rapproche seulement de notre nature.
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