Dans ces conditions, à quoi joue-t-on depuis la fin de l'année dernière ? Chaque fois que Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, syndicat réformiste, réclame sans la moindre nuance le retrait de l'âge-pivot, Édouard Philippe prend tout son temps pour l'admettre, comme s'il ne pouvait franchir le Rubicon qu'au péril de sa vie. La revendication de M. Berger est soutenue par la proposition de réunir une conférence de financement des pensions, laquelle permettrait, en quelques mois, de mettre au point un plan d'équilibre des comptes dont les conclusions remplaceraient l'âge-pivot. Comment le dire ? On peut tenir à cette mesure comme à la prunelle de ses yeux, on doit reconnaître la réalité du rapport de forces. L'exécutif, en effet, est très isolé, face à la surenchère de la CGT et des syndicats qui exigent le retrait pur et simple de la réforme. Or nous avons un temps considérable pour la réforme, nous n'en avons plus pour en finir avec un mouvement dont les conséquences sont nuisibles au confort de nos concitoyens, à la croissance, aux entreprises et donc aux salaires et à l'emploi.
Le chef du gouvernement doit sceller un pacte avec les syndicats réformistes qui répètent qu'ils ont toujours appelé de leurs vœux une réforme susceptible d'assurer l'égalité des retraités. Il ne lui en coûterait que l'âge-pivot, lequel signifie tout simplement qu'il faudra travailler plus longtemps pour toucher la totalité de ses droits. Ce système existe partout en Europe et ici même, nous l'avons soutenu, mais comment ne pas se rendre compte que le temps du chaos devient trop long et risque d'avoir des effets irréversibles, sur tous les plans, économique, social et politique ?
La démagogie crée une réalité.
De toute façon, un accord avec la CFDT et l'UNSA ne règlera pas tout comme par une baguette magique. La CGT ne s'y associera pas, mais, de même qu'elle veut la peau du président, de même, elle tentera vainement de maintenir une mobilisation qui déjà s'effrite et sur laquelle le gouvernement croit pouvoir compter pour passer en force. Le péril de l'entêtement est bien plus grand que celui de la main tendue. Sans prolongation des carrières, mais assortie d'un plan de financement, la réforme aura lieu, le gouvernement n'aura pas été battu en rase campagne, rien ne sera perdu pour lui. Il a peut-être raison sur le fond en souhaitant une réforme ambitieuse qui ne soit pas un chantier permanent, mais en aucun cas il n'est en mesure de passer un texte que 70 % des Français ont rejeté. La CGT, pour ses propres raisons, se livre à une surenchère coupable, mais sa démagogie a créé une réalité, de la même manière que les gilets jaunes ont créé la leur et y restent attachés contre vents et marées.
La leçon du blitzkrieg réformiste auquel Macron se livre depuis deux ans et demi est qu'il peut gagner une fois, deux fois, trois fois mais qu'il ne peut pas gagner à tous les coups. Je lis la couverture du « Point », hebdomadaire très estimable − « (Macron) s'est-il dégonflé ? » − en pensant à la (mauvaise) santé de la presse et à quoi elle est conduite par la concurrence : à présenter les retraites comme un bras-de-fer entre le pouvoir et les syndicats, à commencer à lui reprocher les concessions qu'il envisage mais n'a pas encore acceptées, à y voir comme autant de symptômes de son recul, à continuer à lui adresser ces critiques d'une droite qui, pourtant, aurait dû applaudir à l'application par Macron d'une partie du programme de LR, et à trouver, en quelque sorte, tous les moyens de se réjouir, que la réforme passe ou qu'elle soit abandonnée. Il ne s'agit pas d'un match de tennis élégant. Il s'agit de la capacité de la France à s'adapter aux changements imposés par le siècle.
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