N’IMPORTE QUI peut battre Nicolas Sarkozy et le PS, au fond, n’a pas besoin de Dominique Strauss-Kahn pour emporter les scrutins de 2012. C’est ce que doit se dire Martine Aubry, à qui on ne peut nier que la victoire des cantonales soit la sienne ni qu’elle ait accompli, en peu de temps, une remise en ordre du PS plutôt impressionnante, avec des dates pour les primaires et leur suite, avec la rédaction d’un projet qui avance, avec des propositions de gouvernement. Les candidats, déclarés ou non sont légion, DSK, Aubry, Hollande, Royal, Valls, Montebourg, peut-être Moscovici (si...), Le Scornet, Pierret, et même des inconnus,Anne Mansouret, Aurélien Tricot et Jean Malot. Pléthore. C’est le principe des primaires qui demeure puissamment démocratique, raison pour laquelle nous l’avons toujours soutenu. La campagne doit précisément servir à décanter le bouillon d’où n’émergeront que deux ou trois candidats.
Que demander de plus ?
Un président dont l’impopularité est incomparable, une droite divisée, accablée, pessimiste jusqu’au fatalisme, une gauche qui a triomphé dans toutes élections intermédiaires, des sondages unanimes à annoncer la déroute du président puis de la droite, une gauche qui apparaît maintenant comme le seul rempart contre l’extrême droite, une opinion qui, à 75 %, ne souhaite pas que Nicolas Sarkozy se présente pour un second mandat, que peut demander de plus un socialiste en 2011 ? Et d’où viendrait la plus petite réserve, la tache la plus imperceptible dans ce beau tableau ensoleillé ? Comme le disent beaucoup de socialistes qui gardent la tête froide, ils ne peuvent perdre qu’à cause d’eux-mêmes, qu’à cause de leur ego, qu’à cause du combat des chefs. En effet, qui nous fera croire que Martine Aubry ne se sent pas pousser des ailes, maintenant qu’elle a gagné les cantonales et qu’elle s’effacera devant DSK dès que celui-ci, impérialement, annoncera son retour de Washington ? Comment minimiser l’ascension d’un François Hollande, sorte d’Aubry bien tempéré ou de Strauss-Kahn du terroir, qui séduit l’opinion à la fois par sa discrétion, sa modération et son sérieux ?
On reprochera aussi à la Première secrétaire d’avoir jeté au panier le rapport Montebourg sur les activités malsaines du frère de Jean-Noël Guérini à Marseille; elles font l’objet de poursuites judiciaires qui risquent, à terme, d’éclabousser le président du conseil général des Bouches-du-Rhône, pourtant réélu triomphalement au lendemain des cantonales, comme si les malversations de toutes sortes et les méthodes de gouvernance les plus affairistes ou le racket devaient être inscrits au tableau d’honneur plutôt qu’au passif des intéressés, M. Guérini et son frère. Mais bon, un nuage n’annonce pas toujours l’orage. Une bataille, par exemple entre DSK et Aubry, peut produire des blessures, sans tuer le parti pour autant. Un Hollande peut troubler la musique par sa propre partition, il peut perdre les primaires.
Et puis, il y autre chose. Comme l’aversion pour M. Sarkozy est intense au point de n’être plus mesurable, est-ce que la reconduction du président serait une bonne affaire pour la France ? Gauche, Verts et extrême gauche sont tous soutenus par des électeurs pour qui l’alternance est un must absolu en 2012 et qui, s’ils étaient privés de leur victoire, seraient bien capables de fomenter une révolte ou, mieux, une révolution. Bien entendu, cela ne signifie pas que l’UMP doive d’ores et déjà abandonner le combat ni que la droite au pouvoir ne soit pas en mesure, dans l’année qui vient, d’apporter à l’opinion quelques nouvelles positives, dont le signe avant-coureur est la réduction du déficit public. Aussi bien, la gauche ne peut l’emporter que si elle arrive à l’élection présidentielle avec la légitimité que lui auront donnée les primaires ; que si elle se rassemble ; que si elle met au point un programme crédible de gouvernement (les 300 000 emplois jeunes pour un coût annuel de 4 milliards relèvent presque de l’imposture) ; que si elle identifie ses faiblesses au lieu de faire le voyage électoral dans un fauteuil ; que si elle s’éloigne du sectarisme, de la revanche sociale, du règlement de comptes. Les écueils sont nombreux. Mais la gauche le sait.
François Hollande jeudi dernier à Tulle
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