Les syndicats ont fait de la grève des cheminots un test de la capacité des pouvoirs publics à poursuivre la réforme. La CGT a pris la tête d'un mouvement qui veut arrêter net le programme de « transformation » mis en œuvre par Emmanuel Macron. Cette stratégie prend le relais d'une opposition politique amorphe qui a laisssé le pouvoir jusqu'à présent lancer son blitzkrieg dans la plaine désertée par la droite et par la gauche et où l'extrême gauche et l'extrême droite n'ont pu livrer que des échauffourées : elles ont plutôt souligné leur incapacité à éteindre le souffle réformiste du pouvoir. Jusqu'au moment où les cheminots, et singulièrement les grévistes, notamment les conducteurs de train, ont mis au défi le gouvernement de poursuivre sa campagne.
Interloqué, même s'il ne l'avoue pas, par l'ingéniosité machiavélique d'une grève répétitive contre laquelle n'existe pas de vraie parade, le gouvernement a réagi avec son acharnement coutumier en poursuivant l'inventaire des réformes, à commencer par celle de l'immigration en discussion à l'Assemblée, et celle de la Constitution, qui ne seront pas des parties de plaisir. Façon de dire que si l'armée de Napoléon est bloquée sur une partie de la ligne de front, elle n'en continue pas moins d'avancer dans d'autres secteurs. Mais de l'issue de cette grève dépend toute la dynamique gouvernementale. La bataille n'engage pas seulement des troupes nombreuses dans une épreuve de force d'une rare violence, elle décidera du changement de la société française ou, au contraire, de sa résignation au statu quo.
La population n'a pas trop de raisons de soutenir le pouvoir, même si 57 % des Français sont encore favorables à la réforme. Elle a pris les premières mesures, alourdissement de la fiscalité, encouragement financier au développement des entreprises, réaffirmation de nos engagements européens dans un pays de plus en plus eurosceptique, comme autant de pénalités qu'elle est obligée de payer. Elle devine, bien sûr, sans aller trop loin dans l'analyse, que Macron n'apparaît comme l'ennemi de l'intérêt général que parce qu'il est forcé de modifier des structures sclérosées qui, en l'état, nous conduiraient à notre perte. De sorte que, si elle veut bien essuyer les plâtres d'une expérience nouvelle dans un pays où la grève, après tout, fait partie du paysage social, elle n'entend pas souffrir indéfiniment au nom de la nécessité du changement.
Les erreurs du gouvernement
Le gouvernement a commis des erreurs. Il n'a pas vu venir la forme particulièrement efficace qu'a prise la grève. Il a même fait montre d'arrogance en pensant que la réforme de la SNCF, comme les précédentes, serait un promenade de santé. Il s'en est pris aux cheminots qui ne sont des privilégiés, comme on le dit trop hâtivement, que parce qu'ils ont le pouvoir de paralyser le pays et de politiser un conflit social. Quand il a commencé à rencontrer de vives difficultés, quand il a vu d'autres corps sociaux s'agiter, quand il a commencé à craindre un soulèvement populaire, il a offert des concessions que les syndicats considèrent comme acquises, comme la reprise de la dette de la SNCF par l'Etat, alors qu'elles font partie du deal final.
Mais bien sûr, le pouvoir ne peut pas reculer sur l'essentiel, abandon du statut des cheminots, mise en concurrence de la SNCF. D'aucuns ont vite fait de dire que la réforme du chemin de fer est déjà vidée de son contenu. On voudrait les y voir. Emmanuel Macron est l'homme qui a fait le plus grand nombre de réformes en moins d'un an de mandat que ses prédécesseurs en cinq ou sept ans. C'est l'homme qui a renforcé le leadership de la France en Europe, seulement en se faisant élire et sans donner d'autres gages. C'est l'homme qui nous a évité le déshonneur d'une victoire populiste. C'est l'homme qui est arrivé au pouvoir avec un projet dont la complexité, l'ambition et le fini sont remarquables. Hubris, ivresse du pouvoir, vertige des premières réussites ? Le voilà qui se heurte au premier barrage et qu'il n'arrive ni à l'abattre ni à le contourner. L'intérêt national est néanmoins qu'il passe ce cap.
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