APRÈS L’ENQUÊTE avortée de l’UFC-Que Choisir sur les prix du libre accès, les officines sont confrontées à une nouvelle campagne de communication de Michel-Edouard Leclerc. Son objectif reste inchangé : obtenir le droit de vendre des médicaments dans ses parapharmacies. Pour cela, il joue sur la corde économique, en affirmant qu’il appliquera des prix moins élevés qu’en pharmacie. Pour le prouver, il propose un comparateur de prix (relevés entre le 19 septembre et le 13 octobre 2011) sur 116 produits de parapharmacies vendus dans 12 réseaux différents, dont 5 groupements de pharmacies. Tous les autres circuits y sont jugés plus chers que Leclerc.
Incriminés par cette publicité comparative, les officinaux ont immédiatement contre-attaqué. Pascal Geffray, président d’Évolupharm, demande le retrait de la mention « pharmacies Évolupharm » de cette communication. En qualité d’association, son groupement ne peut être comparé à des sociétés commerciales et il n’a aucune prérogative sur la politique de prix de ses adhérents. À ses yeux, la campagne Leclerc est « illégale, trompeuse et mensongère » car elle joue sur le credo « se soigner moins cher » mais ne concerne aucunement les médicaments. Il souligne, par ailleurs, que le texte de loi qui autorise la publicité comparative spécifie que l’entité visée doit pouvoir répondre « par sa propre publicité comparative ». Or le code de déontologie n’autorise pas les pharmaciens à communiquer. Enfin, l’article L121-8 du Code de la consommation exige que la comparaison porte sur un panel représentatif de produits courants dans la consommation. « Je ne pense pas que les références Nuxe ou Caudalie soient des produits de consommation courante. » Pascal Geffray a envoyé un courrier mardi à la société de groupements d’achats des centres Leclerc (GALEC) et ne cache pas que, en l’absence de réaction, il attaquera en justice.
Volontairement erroné.
Daniel Buchinger, président d’Univers Pharmacie, préfère porter directement l’affaire en justice. Le tribunal de grande instance de Colmar a autorisé, ce lundi, Univers Pharmacie et l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO) à assigner en urgence la société GALEC, le 12 janvier prochain à 9 heures, pour faire cesser cette publicité comparative. L’argumentaire dénonce un « comparatif volontairement erroné », dont la méthodologie est « viciée », faite à partir de « produits non pertinents et en nombre insuffisants ». Il note que la publicité comparative entend établir « un prix moyen des pharmacies sous enseigne Univers Pharmacie à partir d’un échantillon composé en grande partie de pharmacies étrangères à ce réseau ». De plus, l’étude « n’est pas significative du marché de la parapharmacie, dénuée d’objectivité, elle cherche à tromper le consommateur et discrédite ses concurrents ». Daniel Buchinger demande le retrait immédiat de la publicité comparative litigieuse du site internet sesoignermoinscher.com, l’interdiction de sa publication sur tout support et la prohibition de l’utilisation du nom de domaine sesoignermoinscher.com.
La méthodologie de l’étude présente en effet des maladresses. À commencer par la façon de déterminer le nombre de points de vente à visiter en fonction du nombre de points de vente total dans une enseigne. Ainsi, visiter 23 officines sur les 1 949 d’Évolupharm ou les 1 809 de PHR serait suffisant pour atteindre un « seuil de significativité ». Dans les faits, le site sesoignermoinscher.com indique que 33 points de vente PHR et 34 Évolupharm ont reçu la visite d’un client mystère. Des clients mystères vite repérés avec leur liste de 116 produits à acheter ! « Nous avons pointé les pharmacies de notre groupe censées avoir reçu les personnes de l’étude ; nous n’en trouvons que 24 », explique un porte-parole du groupe PHR.
Juste prix.
Chez Giropharm, Isabelle Dusart, responsable de département Économie de l’officine, s’étonne : « Nous avons l’habitude des études qualitatives et quantitatives que nous faisons réaliser par un organisme indépendant, sur nos mises en avant d’assortiment, les taux de vente, etc. Elles portent sur 200 pharmacies ; en dessous de 80 ou 100 officines, l’échantillon n’est pas représentatif. » En l’occurrence, pas une seule des enseignes étudiées ne dépasse la trentaine de points de vente visités.
L’autre biais porte sur le choix des produits. L’un des groupements regrette la forte présence de produits Pierre Fabre, non référencés par ses adhérents, ainsi que la non prise en compte des produits à la marque. « En intégrant les MDD dans chaque famille de produits, nous sommes moins chers que Leclerc. » Giropharm, dont le positionnement est celui du juste prix associé au conseil, note que les 116 références choisies doivent être celles qui bénéficiaient, au moment de l’étude, d’une politique de prix intéressante dans les parapharmacies Leclerc, ce qui ne veut pas dire que les choix promotionnels des autres enseignes ont porté sur ces produits pendant cette même période.
La bataille sur le monopole du médicament n’a pas fini de faire des vagues. Leclerc est toujours prêt à en découdre. Les pharmaciens aussi.
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