ROSELYNE BACHELOT affiche son satisfecit, un an après l’application de la loi interdisant le tabac dans les lieux publics. « Bien des polémiques se sont éteintes. Qui songerait aujourd’hui à un retour en arrière ? », s’interroge la ministre de la Santé. Elle se félicite que cafetiers, restaurateurs, hôteliers et responsables de discothèques soient entrés dans le rang. Les fumeurs, eux aussi, ont joué le jeu. Selon une enquête menée par l’INPES*, ils seraient moins de 5 % à ne pas respecter la loi. Mais si elle est généralement admise, cette mesure ne s’est pas accompagnée d’un arrêt massif du tabac. Depuis son entrée en vigueur, 70 % des accros à la cigarette sortent du bar ou du café pour s’en griller une sur le trottoir (au grand dam des riverains), contre 5 % auparavant. Et seulement 30 % d’entre eux s’abstiennent totalement de fumer en dégustant une bière ou un petit noir (contre 13 % autrefois).
Recul des ventes de patchs.
Le respect de la loi, un écran de fumée ? En tout cas, le nombre de cigarettes vendues ne fléchit pas. Depuis 2004, il oscille chaque année autour de 55 milliards (données de British American Tobacco). Sans compter que de gros consommateurs se sont repliés sur d’autres moyens d’approvisionnement que leur buraliste. Et que le tabac à rouler se répand de plus en plus. « La nouvelle loi n’a pas occasionné de pic d’arrêt du tabac, comme ce fut le cas ces dernières années, notamment avec la hausse du prix des cigarettes », indique Jean-Marc Leder, officinal spécialisé dans le sevrage tabagique. Pour preuve, les ventes de substituts nicotiniques reculent de 11 % en volume en 2008 (données fabricants). Sur ce marché de près de 5 millions d’unités, les patchs sont les plus mal lotis. Ils perdent 27 points en volume, vendus à 1,5 million d’unités environ. Ces dispositifs ont souffert du lancement du Zyban, en 2001. Et plus encore de l’arrivée de Champix, en février 2007. Du côté des substituts nicotiniques, cela ne va pas très fort non plus pour les pastilles (-2 %, à près de 500 000 unités vendues) et encore moins pour les gommes (-9 %, à 2 millions d’unités). Un report s’est effectué vers les comprimés à sucer, qui marquent une croissance de 15 points l’an dernier (un million d’unités vendues). « Ce segment est plus attractif pour les candidats à l’arrêt du tabac car il est plus récent et il est le seul à avoir bénéficié d’innovations, souligne Anne Mallet, chef de produits chez GSK Santé Grand Public. Les comprimés sont aussi préférés pour leurs avantages galéniques (discrétion, désagrégation totale en bouche, etc.).
Pas d’effet libre accès.
Tous ces substituts nicotiniques ne profitent pas, pour le moment, de leur possible présentation devant le comptoir. Encore peu d’officinaux les mettent en avant dans le rayon du libre accès. Les réticences supposées des pharmaciens pourraient venir de vols constatés pour ces références souvent onéreuses. Le recours à des systèmes antivols ou une présentation de boîtes factices seraient un moyen d’y remédier. Mais c’est peut-être surtout un manque de conviction qui limite encore cette exposition en libre accès. Jean-Marc Leder, lui, la propose dans son officine parisienne. « Cela n’a rien changé. Les gens peuvent se servir eux-mêmes, mais pour ces médicaments utilisés au long cours, il y a toujours une forte demande de conseil et la nécessité d’un suivi thérapeutique », constate le pharmacien. Alors, l’année 2009 sera-t-elle plus significative de nouveaux comportements chez les fumeurs ? Pour le moment, on en est encore au stade des bonnes résolutions.
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