À l’image des milieux d’affaires, mais aussi de la grande majorité des professionnels de santé, les pharmaciens britanniques n’ont jamais été enthousiasmés par la perspective du Brexit. Toutefois, leurs organisations se refusent à prendre position officiellement, estimant que le vote lors du référendum du 23 juin 2016 « appartient à la conscience de chacun ». Comme le résume Helga Mangion, porte-parole de la NPA, l’association nationale des pharmacies d’officine indépendantes, « notre rôle n’est pas de juger le Brexit, mais d’être aux côtés des pharmaciens ».
Alors que les associations de médecins et d’infirmières réclament la tenue d’un second référendum pour « éviter le chaos du 29 mars », la Société royale de pharmacie (RPS), principale association des pharmaciens britanniques, refuse de s’associer à cette demande. Son président, Ash Soni, n’en estime pas moins vital de trouver un accord pour que les patients puissent continuer à être traités. Beaucoup plus europhiles que leurs confrères anglais, les représentants des pharmaciens écossais, eux, n’hésitent pas à dire tout haut que « le Brexit est un désastre », l’Écosse ayant d’ailleurs voté à 67 % pour rester dans l’Union lors du référendum de 2016.
Six semaines de stock
Dans le cadre d’un plan d’urgence présenté en décembre dernier, le ministère de la Santé a chargé les industriels et les grossistes de stocker au moins six semaines de médicaments pour prévenir toute rupture d’approvisionnement en cas de Brexit « dur ». Les pharmaciens sont, eux, invités à ne pas constituer de stocks, pas plus d’ailleurs que les patients. Mais dans la réalité, nombre de malades ont commencé à faire des réserves. De même que certains pharmaciens. Le prix d’achat des génériques est d’ailleurs déjà en train d’augmenter fortement, a constaté le comité chargé de la négociation des prix des médicaments, ce qui prouve que, en dépit des engagements, certains pharmaciens essaient de stocker. En cas de pénurie, ils seront autorisés à refacturer plus chers les médicaments au NHS qu’en temps normal.
Au-delà de l’approvisionnement et des stocks, les pharmaciens devront veiller, dès le 29 mars, à ce que leurs employés issus de pays membres de l’UE soient en règle avec les dispositions transitoires relatives aux étrangers, pour lesquels différentes dérogations sont maintenues au moins jusqu’à fin 2020.
La substitution revendiquée
Pour limiter le risque de rupture d’approvisionnement, les pharmaciens appellent les médecins à mieux se concerter entre eux pour rationaliser leurs prescriptions, et plaident pour un élargissement du droit de substitution. Les médecins prescrivent beaucoup de génériques, mais les pharmaciens, sauf en Écosse, n’ont le droit de substituer ni une spécialité ni un générique de marque par un autre générique si le médecin indique une dénomination commerciale et non une DCI. Les officinaux réclament donc ce droit pour mieux répondre aux ruptures de stock. La mesure est d’ailleurs envisagée dans le cadre du plan d’urgence, mais n’a toujours pas été officialisée. « De plus, ajoute Helga Mangion, le problème des ruptures de stock après le Brexit risque d’être d’autant plus grave que nous en rencontrons déjà de plus en plus souvent. »
Fin de la réciprocité
Par ailleurs, et ceci peut concerner très directement les patients français au Royaume-Uni, de même que les patients britanniques dans l’UE, Londres rappelle que « tous les accords de prise en charge et de réciprocité des traitements cesseront d’être valables le 29 mars prochain », et que des nouvelles dispositions à ce sujet seront communiquées « ultérieurement ».
Au-delà des innombrables complications administratives et pratiques, la plupart des pharmaciens s’accordent pour estimer que le pays, comme son système de santé, va se jeter dans l’inconnu le 29 mars si aucun garde-fou n'est prévu.
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