LE SCÉNARIO de référence, dit « tendanciel », évoqué par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) dans son étude parue la semaine dernière, prévoit une baisse de l’effectif des médecins de 10 % sur dix ans (188 000 en 2019), puis une hausse permettant de revenir à 206 000 à l’horizon 2030. Mais les médecins se trouveront alors face à une population qui se sera étoffée de 10 %, avec des besoins accrus liés au vieillissement. La densité médicale devrait donc globalement chuter, passant de 327 à 292 médecins pour 100 000 habitants pour l’ensemble de la France, DOM compris, entre 2006 et 2030. Les disparités de densité médicale entre régions seraient profondément bousculées, avec de fortes chutes en Corse (-35 %), Languedoc-Roussillon (-30 %), Ile-de-France (-26 %), Provence-Alpes-Côte d’Azur (-26 %) et Midi-Pyrénées (-22 %). En revanche, le Poitou-Charentes (+16 %), la Franche-Comté (+15 %), la Basse-Normandie (+12 %), la Bretagne (+11 %), l’Auvergne (+11 %) et la Lorraine (+10 %) verraient cette densité médicale augmenter. Néanmoins, les déserts médicaux vont s’étendre puisque, à l’horizon 2030, « le nombre de médecins exerçant en zone rurale diminuerait de 25,1 %, le nombre de médecins exerçant en couronne périurbaine ou dans une commune multipolarisée de 10,5 %, et le nombre de médecins exerçant dans un pôle urbain sans CHU de 6,2 %. En revanche, le nombre de médecins exerçant dans les pôles urbains avec CHU augmenterait de 5,5 % ».
Interdépendance.
Une analyse qui, à défaut d’être surprenante, n’en est pas moins inquiétante, notamment aux yeux de l’Ordre national des pharmaciens. Jean-Luc Audhoui, trésorier du CNOP, explique : « Il n’est pas concevable qu’un pharmacien puisse vivre ou survivre dans un environnement sans prescripteur. La démographie pharmaceutique est très liée à la population médicale. Or, on ne déplace pas aussi facilement une pharmacie qu’un cabinet médical. C’est compliqué économiquement et difficile juridiquement ». C’est pourquoi Jean-Luc Audhoui appelle de ces vœux que les règles d’installation qui prévalent pour les officinaux soient appliquées à d’autres professions. « C’est ce qu’on a appelé le maillage territorial et que je préfère nommer aménagement du territoire car nous prenons en compte l’offre de soins faites aux patients. C’est un privilège pour les patients d’avoir une pharmacie couvrant les besoins de 2 500 habitants ». Cette répartition démo-géographique fonctionne bien et permet d’assurer un certain niveau de sécurité et de santé publique.
« À quoi cela servirait, par exemple, d’organiser la répartition des chirurgiens, mais pas celle des anesthésistes, sans qui le chirurgien n’est rien ? De la même façon, l’interdépendance est forte entre le médecin et le pharmacien. Chaque changement dans l’une des deux professions impacte l’autre. »
Les professions médicales et paramédicales savent qu’elles entrent dans une phase difficile quant à leur démographie. Ce n’est pas un hasard si les médecins réclament une constante augmentation du numerus clausus afin de compenser les manques de praticiens, notamment provoqués par celui imposé à la fin des années 1980 et jusqu’en 2000 (de 3 500 à 4 500). Il est aujourd’hui fixé à 7 400, mais la ministre de la Santé prévoit une augmentation progressive jusqu’à 8 000 en 2011.
« La plupart des médecins ne veulent pas aller en milieu rural, dans les déserts médicaux. Les pharmaciens qui s’y trouvent sont alors très isolés et ceux qui souhaitent s’en aller ou prendre leur retraite ne trouvent plus d’acquéreur. Ils doivent accepter de voir disparaître l’activité pharmaceutique », constate Jean-Luc Audhoui.
Maximum historique.
Selon l’étude prospective du CNOP, publiée en 2002, une « brutale augmentation du nombre de cessations d’activité interviendra en 2011 et se poursuivra régulièrement pour atteindre son apogée en 2019 », soit la date à laquelle le nombre de médecins aura diminué de 10 % si l’on en croit la DREES. Bien que l’Ordre ait été partiellement entendu (le numerus clausus d’entrée en deuxième année d’étude pharmaceutique a progressivement été augmenté entre 2002 et 2007, de 2 250 à 3 090), cela reste insuffisant et son président, Jean Parrot, s’en est ému dans « La lettre des Nouvelles Pharmaceutiques » de février 2009. « Faute de candidat à embaucher, des confrères titulaires d'officine ne peuvent respecter l’obligation d’effectif liée à leur chiffre d’affaires (...) Cette incohérence de la part des pouvoirs publics nous choque. Veut-on inciter les étudiants français à faire leurs études et leur carrière dans d’autres pays de l’Union européenne ? », s’insurge Jean Parrot. Dans tous les cas, une baisse importante des effectifs est inévitable « dans la plupart des métiers de la pharmacie, au cours de la période 2011-2020 ».
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