« UN PAYSAGE, c’est comme un tableau de maître. On doit le respecter. » Toutes les passions de Philippe Chatenet sont résumées dans cette formule. En effet, ce pharmacien de Lanouaille, en Dordogne, est d’abord un amoureux de sa région et de son patrimoine naturel, qu’il arpente lors de sorties botaniques ou mycologiques. Mais ce naturaliste de 46 ans arpente aussi les musées, avec la même ferveur, pour assouvir sa passion pour l’art. De préférence brut ou contemporain.
Philippe Chatenet grandit dans une famille d’ébéniste de Payzac, à quelques kilomètres de son actuelle officine. Rien ne le prédestine à la pharmacie : « En terminale, je suis allé à une journée portes ouvertes à la faculté de pharmacie de Limoges, explique-t-il. Le déclic s’est produit lorsque je suis entré dans le laboratoire de botanique. Face à tous ces échantillons à déterminer, je me suis dit que c’était ma voie. » Il entame donc son cursus. « Limoges est une faculté à taille humaine, où nous avons bénéficié d’un enseignement de grande qualité », souligne Philippe Chatenet. Sa thèse, dirigée par le Pr Axel Ghestem, porte tout naturellement sur l’étude botanique des Gorges de l’Auvézère, en Dordogne.
Il commence ensuite à exercer en officines, mais poursuit en parallèle ses travaux de recherche. Travailleur acharné, il décroche un DEA en chimie et microbiologie de l’eau, à l’université de Poitiers, travaille sur l’écotoxicité et les relations pollution-végétation dans les cours d’eau. En 2000, il publie une thèse d’université sur ce sujet et obtient la qualification de maître assistant. En attendant un poste universitaire, il publie études et travaux dans diverses revues scientifiques comme « Acta Botanica Gallica », donne des conférences, tout en assurant des remplacements en officines. Mais très vite, il doit se rendre à l’évidence : aucun poste universitaire ne se libère. C’est pourquoi, il opte définitivement pour la carrière officinale. « Mon employeuse de Lanouaille allait prendre sa retraite, j’ai repris 50 % des parts en 2005, et l’autre moitié en 2007. »
Dès lors il se consacre pleinement à sa pharmacie et obtient un transfert sur l’axe de passage de la commune. « Je suis bien dans mon officine, j’adore le contact avec le client, je suis très attaché au conseil, à la proximité. » Exerçant dans sa région natale, inutile de dire que Philippe Chatenet connaît tous ses clients locaux, même si sa pharmacie accueille une importante clientèle de passage, souvent des Anglo-saxons, attirés par le tourisme vert de cette région aux confins du Périgord et du Limousin.
Mais il n’oublie pas son passé de botaniste. Son officine fait une grande place au conseil en phytothérapie et aromathérapie. Il anime régulièrement des sorties botaniques et mycologiques, à la demande d’associations, clubs de randonneurs, écoles, sociétés mycologiques du Périgord ou du Limousin. Des balades durant lesquelles il fait partager sa passion des plantes et de la protection des milieux naturels : « l’environnement de notre région n’a cessé de se dégrader, à l’image de certaines landes qui disparaissent, précise-t-il, mais la prise de conscience semble commencer. »
Jardin secret.
Loin des plantes et des rivières, Philippe Chatenet avoue un autre jardin secret : « Je suis un rat de musées. Je suis, en particulier, très sensible à l’art contemporain et à l’art brut. Désormais c’est la passion de ma vie. Je crois qu’elle a pris le pas sur la botanique. J’ai découvert l’art avec les parents d’un ami qui étaient collectionneurs. Ils m’ont initié au design, à l’art moderne… L’art me provoque des émotions à nulle autres pareilles. »
Ses artistes favoris : la sculptrice Louise Bourgeois, le peintre Dubuffet. Il cite aussi volontiers l’artiste limousin Paul Rebeyrolle, Robert Combas, Gaston Chaissac, Germaine Richier… « Je collectionne un peu, précise-t-il, des céramiques surtout, quelques toiles, et je voyage dans les grands musées d’Europe… »
Malgré ses pérégrinations artistiques, Philippe Chatenet demeure un homme solidement enraciné dans son terroir comme dans son métier. Fier d’être le cinquième pharmacien de Lanouaille, comme en atteste l’ouvrage du Pr Guy Devaux*, il a aussi plaisir à savoir que, parmi les professionnels de santé natifs de la commune, figure Jean-Baptiste Darnet, le chirurgien découvreur du kaolin, à l’origine de la porcelaine de Limoges. Comme quoi, dans cette région, la frontière entre la science et l’art a toujours été poreuse.
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