S’il a une vision libérale de la société, voire de l’économie, le nouveau président de la République, aurait plutôt tendance, en matière de santé, à prôner l’étatisme. C’est l’avis que partagent Didier Tabuteau, responsable de la chaire Santé de Sciences Po, et Thierry Beaudet, président de la Mutualité française. Cependant la convergence de points de vue s’arrête là.
Conviés à débattre par Ortus Santé*, les deux experts défendent chacun une vision différente du rôle de l’État dans la protection sociale. Alors que Didier Tabuteau se réfère aux origines de la Sécurité sociale et de la position qui lui était dévolue en 1945, Thierry Beaudet fustige son ingérence. L’assurance maladie obligatoire ne négocie-t-elle pas avec les professionnels de santé libéraux, sans vision globale, reléguant les assurances maladie complémentaires en bout de table ? Et d’affirmer sans appel « plus d’État n’est pas souhaitable. Il faut au contraire mettre de l’émulation dans le système ».
La complémentaire santé en question
Une chose est sûre, face à ce qu’il est convenu de nommer, selon Didier Tabuteau, le « maelstrom » de la protection sociale, le prochain quinquennat ne pourra faire l’économie d’une redéfinition des rôles. Emmanuel Macron semble l’avoir compris puisqu’il a d’ores et déjà convié tous les acteurs du système de santé à évaluer les enjeux de demain. Et sans doute à arbitrer le rapport de force qui oppose assurance maladie obligatoire et assurance maladie complémentaire.
Cette dernière, bien que ne soutenant que 14 % des frais de soins (soit en valeur 26 milliards d’euros) ne veut plus être reléguée au rang de « payeur aveugle », comme le dénonce Thierry Beaudet. Aussi, attaquée pour ses frais de gestion (7 milliards d’euros), la Mutualité française entend se défendre : « On ne peut comparer la Sécurité sociale en situation de monopole, dont la collecte des cotisations est assurée par les URSSAF, qui, en outre, cumule 25 milliards de dettes sociales et creuse son déficit, avec les assurances complémentaires qui ont, elles, des comptes équilibrés. » Thierry Beaudet poursuit son plaidoyer : « On nous reproche des frais de publicité mais nous sommes dans une situation de marché. De plus, le volume de nos taxes équivaut, en moyenne chaque année, à un mois et demi de cotisations. »
Didier Tabuteau réplique en suggérant une affectation de ces 7 milliards d’euros à la prise en charge des soins. Selon lui, une redéfinition des rôles respectifs des deux régimes n’est pas seulement suscitée par le prochain quinquennat mais, de manière générale, par la transformation du système de santé. Emmanuel Macron en a donné le premier signal en proposant, dans son programme, la réduction à trois du nombre de contrats de complémentaires santé. Didier Tabuteau, défenseur d’une fusion des deux étages du système de protection sociale (régime obligatoire et régime complémentaire) y voit le signe précurseur d’une standardisation des couvertures complémentaires. Et in fine, de leur déliquescence. Car, ne manque-t-il pas de remarquer « plus on standardise l’offre de l’assurance complémentaire et plus la question de son maintien se pose ». Ceci d’autant plus que la liberté de choix de l'assuré, de facto, se perdrait.
* Agence de communication et d'information spécialisée dans les processus de décision et de management en Santé.
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