DEPUIS QU’IL A PRIS ses fonctions à la fin de l’année dernière, M. Draghi a mis en œuvre une politique très différente de celle de son prédécesseur, Jean-Claude Trichet, et peu conforme aux exigences exprimées par la chancelière allemande, Angela Merkel. Les statuts de la Banque centrale européenne (BCE) qui, certes, affirment son indépendance à l’égards des autres pouvoirs européens, ne lui permettent pas pour autant de s’occuper d’autre chose que de la stabilité monétaire et de la lutte contre l’inflation. La croissance ne figure pas dans ses attributions. Lorsque M. Draghi, en deux fois et trois mois, a prêté aux banques européennes la bagatelle de mille milliards d’euros pour trois ans et au taux d’intérêt de 1 %, il a fait exactement ce que Mme Merkel lui demandait expressément de ne pas faire, car sa décision correspondait à une monétisation de la dette. Il n’empêche que, d’une part, on n’est pas sûr que Mme Merkel ne se soit pas fait forcer la main, peut-être en toute connaissance de cause, et d’autre part, que M. Draghi a ramené au moins un calme provisoire sur les marchés.
Un soutien de facto à Hollande.
Voilà maintenant que M. Draghi, qui a en Europe autant de prestige que l’excellent Mario Monti, successeur de Berlusconi, met le doigt sur une évidence : les politiques d’austérité conduisent à la ruine des États parce qu’elles tuent la croissance et que, sans croissance, les pays endettés ne pourront jamais rembourser leur dette. Comme par hasard, c’est la thèse de François Hollande, de sorte que, à quelques jours du second tour, M. Draghi apporte bel et bien dans les faits un soutien au candidat socialiste. Celui-ci en effet souhaite renégocier le Pacte de stabilité européen et le fameux MES, mécanisme européen de solidarité. Sa position semblait remettre en question le résultat des sommets européens multiples qui sont parvenus, non sans de pénibles efforts, à résoudre le problème de la Grèce. Mais si les institutions européennes elles-mêmes sont prêtes à envisager un plan européen de relance, par exemple sous la forme de grands travaux d’infrastructure utiles, M. Hollande apparaît non pas comme un gêneur mais comme un bon interlocuteur.
On verra bien si Mme Merkel approuvera ou non l’idée de M. Draghi. On peut penser en outre que des initiatives de croissance peuvent être adoptées individuellement par les États de l’Union sans remettre en cause les efforts pour réduire la dépense publique. On peut craindre enfin que l’idée de M. Draghi soit mal interprétée et qu’elle conduise quelques gouvernements à croire qu’ils viennent de recevoir le feu vert pour une politique laxiste.
Le redressement financier des pays membres de la zone euro, y compris l’Allemagne, très endettée, ne saurait être remis en question. Il y va de l’unité européenne et de la réputation de l’UE. De l’avenir. Nicolas Sarkozy, en définitive, a beaucoup plus indigné nos partenaires quand il a demandé une révision des accords de Schengen sur la libre circulation des personnes que François Hollande ne les a indisposés quand il a exigé que l’on inscrive la croissance dans le Pacte de stabilité. On n’imagine pas M. Draghi prenant parti dans la campagne électorale française, bien que les Italiens aient été très fâchés du mépris affiché par le président sortant pour Silvio Berlusconi juste avant la démission de l’ex-président du Conseil. Ce serait, si c’est vrai, une autre des erreurs de M. Sarkozy, qu’il paie au triple dans un moment crucial de la campagne.
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