Difficile aujourd’hui de faire abstraction, dans l’exercice quotidien, des tests antigéniques et de la vaccination. Il en est de même à la lecture des chiffres clés de l'économie officinale pour 2021 présentés par le GERS Data et le GERS GIE*. 1,9 milliard d’euros figurent au bilan de l’année écoulée pour les seuls 70 millions de TAG réalisés en officine. Dans une moindre mesure, 110 millions d'euros ont été engrangés par les 85 % de pharmacies participant à la campagne vaccinale contre le Covid.
Pour autant, le séisme des TAG et des vaccins qui secoue les pharmacies a eu peu d’impact sur la fréquentation en 2021. Le trafic hors Covid est ainsi resté étale : -1 % par rapport à l’année précédente, -2 % par rapport à 2019. Pour autant, tous les segments traditionnels sont en progression, à l’exception du vétérinaire, et contribuent à une hausse globale de l’activité officinale de 6,6 %, à 38,461 milliards d'euros.
Reprise des prescriptions
Portée par la reprise de l’activité des cabinets médicaux, notamment celle des généralistes en hausse de 4 %, le médicament remboursable reprend de la vigueur à + 8 % (+ 10 % par rapport à 2019), pour un chiffre d'affaires de 1,701 milliard d'euros. Certes, toutes les spécialités, hormis la pneumologie (on comprend pourquoi), marquent le pas par rapport à 2019, mais les prescriptions de ville, en hausse de 4 %, retrouvent leur niveau de 2019. Comme le relève David Syr, directeur général adjoint du GERS Data, les médicaments chers y contribuent pour une large part. Les cinq classes de produits remboursables les plus vendus en ville restent les antinéoplasiques inhibiteurs de la protéine kinase, les inhibiteurs directs facteur XA, les antinéovasculaires, les anti TNF, ainsi que les antiviraux VIH. Dans son ensemble, le marché du remboursable reste très concentré, dix classes de produits totalisant 37 % du chiffre d'affaires et cinq produits contribuant à une croissance de 789 millions d'euros (voir tableau ci-dessous). Parallèlement, le taux de pénétration du générique a continué de progresser pour atteindre désormais 83,9 %, soit 3,1 points de plus qu’en 2019.
La pharmacie a également pu compter sur le retour des pathologies hivernales avec une hausse de 6 % des diagnostics de laryngite et trachéite aiguës et de 4 % des rhinopharyngites aiguës, en médecine générale. Même si, souligne le GERS Data, ces taux restent bien en deçà des niveaux de 2019. L’année dernière comptabilise respectivement 46 % et 29 % en moins quant à la prise en charge de ces pathologies.
Près de 10 % de croissance dans le non-remboursable
Cette mise sous cloche des affections hivernales se reflète également dans l’automédication. Cependant, après un début d’année difficile et une baisse de 25 % au premier trimestre, les ventes en automédication ont quelque peu repris de la couleur. Au top 5 des produits les plus vendus, Doliprane, Doliprane Tabs, Daflon, Nurofenflash et Lysopaïne totalisent un chiffre d'affaires de 244 millions d'euros.
Soutenu par une croissance de près de 63 millions d’euros enregistrée par cinq classes de produits (voir tableau ci-dessous), ce segment clôture l’année à +2 %. Mais toujours à - 5 % comparé au niveau de 2019.
Dans sa globalité toutefois, le segment du non remboursable crée la surprise et signe à +9,6 %, la plus forte progression du marché officinal. Dans cette période épidémique, les tendances attestent en effet d’une reprise en main de la santé par le patient lui-même. Ainsi, les compléments alimentaires, principalement dans les indications de l’immunité, des troubles de l’humeur, de la vitalité et du sommeil, font un bond de 11 % par rapport à 2020 et de 15 % par rapport à 2019. Sous leur nouvelle galénique de gummies, ils performent même à + 131 %, soit un chiffre d’affaires de 37,8 millions d’euros, contre 13,3 millions deux ans auparavant.
Autre signe de la situation sanitaire, les ventes en hygiène et dermocosmétique continuent de progresser de 5 % après le + 4 % réalisé entre 2020 et 2019, tandis que le bio réalise un chiffre d’affaires de 393 millions d’euros, soit 8 % de mieux qu’en 2020, année qui avait déjà surpassé de 19 % les ventes de 2019.
L’exercice 2021 restera-t-il comme un tournant dans l’économie de l’officine ? Il témoigne en tout état de cause de l’étonnante élasticité dont a fait preuve la profession, analyse David Syr. Car les pharmacies ont réussi ce tour de force en absorbant les flux de demandes en TAG et vaccins sans négliger pour autant le développement de leurs autres segments d’activité. Bien que restant très dépendant de son cœur de métier, la dispensation du médicament remboursable, l’officinal parvient ainsi, en chef d’entreprise, à identifier et à miser sur d’autres ressorts de croissance.
*Les ateliers virtuels du GERS n° 20 du 13 janvier 2022.
Lire également en page 14 l'analyse économique de Fiducial sur la rentabilité des officines.