Contraception d’urgence : informez avant de délivrer !

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Publié le 27/10/2022
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La délivrance de la contraception d’urgence à l’officine doit toujours s’accompagner d’une information sur le mode d’action de ce médicament et sur l’importance d’avoir une contraception au long cours. Explications du Dr Brigitte Letombe*, gynécologue à Paris.

Le Quotidien du pharmacien.- Au 1er janvier 2023, la contraception d’urgence délivrée en pharmacie sera prise en charge à 100 %, sans ordonnance, pour toutes les femmes. Que pensez-vous de cette mesure ?

Brigitte Letombe.- D’un côté, c’est une bonne chose car les femmes vont plus facilement penser à la contraception d’urgence en cas de rapport sexuel à risque de grossesse non désirée. Son accès sera rapide, facile, gratuit. Mais d’un autre côté, il ne faut pas que ce mode de contraception les éloigne d’une prise en charge de leur santé sexuelle, qui ne se résume pas à la contraception d'urgence. Le rendez-vous médical est important : il permet de choisir un mode de contraception adapté, d'aborder la fertilité, les difficultés sexuelles, le dépistage, etc.

Quels sont les risques de la contraception d’urgence ?

Elle n’est pas dangereuse, elle peut être prise plusieurs fois. Mais elle ne marche pas à 100 %. Il faut donc que les utilisatrices s’assurent que les règles suivantes sont normales et si tel n’est pas le cas, qu’elles fassent un test de grossesse. Par ailleurs, l’accès gratuit sans ordonnance à la contraception d’urgence présente un risque, celui que des femmes l’utilisent comme mode de contraception après chaque rapport sexuel. Avec un risque de grossesse élevé, puisque les cycles sont perturbés. De plus, certaines femmes peuvent délaisser la prévention locale (préservatifs), avec le risque de contracter une IST.

Pour toutes ces raisons, sa délivrance doit s’accompagner d’une information sur son mode d’action - qui n’est pas abortif, mais qui permet de décaler l’ovulation de quelques jours et d‘éviter ainsi la rencontre de l’ovule avec les spermatozoïdes - et sur l’importance d’avoir recours à une contraception au long cours.

Les modes de contraception continuent à évoluer vers moins de pilules œstroprogestatives. Que pensez-vous de cette évolution ?

L’hormonophobie s’est instaurée dans les années 2000 avec le THM, puis avec les pilules œstroprogestatives. Des événements très médiatisés qui ont malheureusement diabolisé les œstroprogestatifs. Ainsi, de plus en plus de femmes ont recours à des méthodes de contraception naturelles pour ne pas prendre d'hormones… Avec un risque de grossesse de 15 à 20 %, alors qu’il est de moins de 1 % avec une contraception hormonale bien conduite. Et au final, on oublie que la balance bénéfice/risque de la contraception œstroprogestative est importante chez les femmes ne présentant pas de risque thromboembolique : protection vis-à-vis des cancers gynécologiques, effets bénéfiques sur la peau, l’acné, la pilosité… Quant à la contraception toute progestative, c'est une bonne alternative à la contraception œstroprogestative, mais elle ne présente pas les mêmes effets bénéfiques, peut provoquer parfois des saignements et de l’acné, et peut ne pas être bien supportée.

*Auteure du livre « Femmes, réveillez-vous ! » aux éditions First.

Propos recueillis par Charlotte Demarti

Source : Le Quotidien du Pharmacien