L’arrivée d’un nouveau virus suscite toujours la curiosité. Va-t-il s’intégrer sans bruit au reste du monde vivant ou devenir une menace pour l’humanité ? Arnaud Fontanet se souvient avec précision de la publication de Gabriel Leung le 31 janvier 2020 dans « The Lancet », une étude de modélisation réalisée à partir de données chinoises sur ce qu'on appelle encore le virus 2019-nCoV. « Il nous apprend que le nombre de cas secondaires par personne infectée est de 2,68, c’est considérable, que le temps de doublement de l’épidémie est de 6 jours et que le virus pourrait infecter 60 % de la planète : c’est un choc ! » Au même moment, des chercheurs allemands tout aussi respectés démontrent, dans le « New England Journal of Medicine » (NEJM) qu’une personne asymptomatique peut transmettre le virus à un groupe de personnes. Déstabilisée, la France prendra pleinement conscience de la menace une fois que la première vague touche le nord de l’Italie, fin février. « On a vu les images de salles reconverties en hôpitaux de fortune chez nos voisins, on s’est identifié… »
La recherche bat son plein, la France réunit des experts, le Conseil scientifique, sous la présidence de Jean-François Delfraissy et dont Arnaud Fontanet fait partie, publie son tout premier avis le 12 mars. « On fait état d’une situation très dégradée au nord de l’Italie, d’un doublement de l’épidémie en 4-5 jours, de sujets de moins de 60 ans avec des formes très sévères qui allaient devoir être gardés en réanimation pendant au moins trois semaines, donc avec un risque de saturation des hôpitaux. L’OMS a déclaré l’état de pandémie le 11 mars. Et des modélisations de l’Imperial College nous laissent entendre que 50 % de la population pourrait être infectée, avec un taux de létalité de 0,5 à 1 %, soit des centaines de milliers de Français qui allaient mourir si rien n’était fait, et qu’il faut réduire nos contacts d’au moins 60 %. Donc l’impensable s’est produit : La France, après l’Italie et l’Espagne, entre en confinement le 17 mars. Le pays est à l’arrêt face à une menace qu’on n’a pas pu stopper autrement. »
Réponse biomédicale
Car oui, le confinement fonctionne : le pic d’admission à l’hôpital se produit en moyenne 11 jours après, puis chute. Problème : après cette première vague meurtrière, seulement 5,3 % de la population a rencontré le virus, c’est bien loin des 50-60 % nécessaires pour arrêter la circulation épidémique. « Le confinement gèle la situation, et c’était nécessaire, il ne la résout pas, c’est une solution d’attente mais il faut, à un moment, une réponse biomédicale avec des traitements et des vaccins. Or, fin 2020, de façon inespérée, un vaccin efficace à 95 % sur les formes symptomatiques est prêt ! », rappelle Arnaud Fontanet.
Avec un recul à trois ans sur l’excès de mortalité en Europe, l’épidémiologiste note que la France « ne s’en sort pas si mal », mais le meilleur élève est le Danemark. Sa méthode ? La réponse précoce. La première ministre danoise, Mette Frederiksen, prend en effet les premières mesures de contrôle de l’épidémie qui aboutissent à un confinement dès le 10 mars, soit une semaine avant la France, alors que le pays compte 10 personnes hospitalisées sur 6 millions d’habitants. Rebelote en novembre 2020 : le Danemark confine une semaine plus tôt, mais déconfine un mois plus tôt. Enfin, quand Omicron arrive, les mesures restent légères et s’appuient sur une vaccination massive. Un modèle qu’Arnaud Fontanet invite à suivre mais qui doit reposer, pour le gouvernement comme pour la population, sur une grande confiance dans la science.
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