Tous les pharmaciens pourront bientôt s’appuyer sur le dispositif d’alerte sécurisée automatisée aux fausses ordonnances (ASAFO) pour l’instant disponible uniquement en Île-de-France. Pour toucher la ROSP à l’usage de cet outil, mesure prévue dans l’avenant à la convention pharmaceutique, les officinaux devront encore patienter.
C’est une arme de plus pour aider les pharmaciens à lutter contre les ordonnances frauduleuses. Reste à voir si elle sera efficace. Lancé en 2011 par la Caisse primaire d’assurance-maladie d’Île-de-France et uniquement accessible aux pharmaciens de cette région, ASAFO devait être déployé dès ce mercredi 12 juin sur tout le territoire. Pour y accéder, il faut simplement se connecter « via Amelipro avec la carte CPS ou e-CPS du pharmacien titulaire, la carte CPS d’adjoint ou CPE d’un salarié de l’officine », précise la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Les pharmaciens installés hors de la région parisienne et qui ont tenté de consulter l’outil dès ce mercredi matin n’ont toutefois pas réussi. « Il n’y a pas d’onglet ASAFO sur Amelipro et le site d’ASAFO renvoie toujours vers l’ancienne version réservée aux pharmaciens franciliens », a pu constater Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Pour le moment, les officinaux ne semblent pas non plus avoir été prévenus par l’assurance-maladie de la possibilité d’utiliser ce dispositif. (voir ci-dessous).
Pour rappel, le dispositif ASAFO permet au pharmacien de vérifier si une ordonnance dont il soupçonne qu’elle est frauduleuse n’a pas déjà fait l’objet d’un signalement. Il peut aussi être utilisé pour déclarer une fausse ordonnance lorsque cela est avéré. « L’extension d’ASAFO à toute la France répond à une obligation de contrôle renforcé de la dispensation de médicaments onéreux, qui est prévue par la Convention pharmaceutique de 2022, précise Philippe Besset, président de la FSPF. Il doit être utilisé par le pharmacien lorsque ce dernier à un doute sur l’origine d’une ordonnance portant sur des médicaments de plus de 300 euros et qu’il ne connaît ni le patient ni le prescripteur. »
La participation du pharmacien à la lutte contre les fraudes a été au cœur des récentes négociations avec l’assurance-maladie. Dans ce cadre, la CNAM et la FSPF, seul syndicat à avoir décidé de signer l’avenant économique, se sont accordées sur l’idée d’une ROSP liée à l’utilisation d’ASAFO. D’un montant de 100 euros, elle sera versée à tout pharmacien qui se connecterait au moins une fois par semaine à l’outil pendant 90 % de l’année (ce qui équivaut donc à au moins une connexion pendant 46 semaines). « Le déclenchement de la ROSP, lui, n’est pas encore effectif », avertit toutefois Philippe Besset. Autrement dit, si des pharmaciens se connectent dans les prochaines semaines, cela ne comptera pas pour atteindre le fameux total de 46 semaines et espérer toucher cette ROSP. Le compteur ne sera débloqué que lorsque l’avenant entrera en vigueur, via la publication d’un arrêté au « Journal Officiel », donc pas avant le mois de juillet.
Le déploiement national d’ASAFO suscite encore quelques interrogations chez les représentants des pharmaciens. Quid de son efficacité ? Les officinaux installés hors d’Île-de-France ne devront premièrement pas s’étonner de ne trouver aucune ordonnance falsifiée à consulter au départ. ASAFO n’étant accessible qu’aux pharmaciens franciliens jusqu’à présent, il ne contient, logiquement, que des ordonnances signalées par des officinaux de cette région. Il faudra attendre que les pharmaciens se saisissent de l’outil et l’enrichissent pour que la base de données soit suffisamment fournie. Autre limite, ASAFO n’est pas intégré aux LGO, du moins pas pour le moment, au grand dam des syndicats. Qu'en sera-t-il de son ergonomie ? Les pharmaciens franciliens qui l’expérimentent depuis de nombreuses années ont souvent critiqué le manque de rapidité et de fluidité d’ASAFO. La version de base, que l’on pourrait qualifier de vieillotte, est censée « faire l’objet d’évolutions afin de tenir compte des propositions d’amélioration des pharmaciens utilisateurs », promet en tout cas l’assurance-maladie.
Enfin, se pose la question de son utilisation par le pharmacien en vie réelle. Un dernier point qui ne manque pas d’inquiéter Philippe Besset. « Je ne veux pas que les confrères se mettent en danger. Dans ce cas, il faut qu’ils puissent délivrer et, a posteriori, qu’ils indiquent la mention "délivrance sous contrainte" permettant à la fois d’éviter un indu et d’informer les forces de l’ordre », propose le président de la FSPF, qui a fait part de cette demande à la CNAM.
Mise à jour : L'assurance-maladie a confirmé ce mercredi en fin d'après-midi le report du déploiement de l'outil ASAFO, qui était initialement prévu ce 12 juin. La CNAM précise en avoir « informé les représentants de la profession auprès de qui elle reviendra pour avertir de la date de mise en œuvre de cet outil ».
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