L’assurance-maladie a présenté ce matin ses stratégies pour lutter contre la fraude, en particulier chez les professionnels de santé qui représentent à eux seuls près des deux tiers des détections. Des enquêtes d’évaluation de la fraude permettent déjà d'estimer les taux de préjudice financier pour les infirmiers ou les médecins généralistes. L’enquête sur les pharmaciens se déroulera au premier semestre 2023. Mais sans attendre cette évaluation, l’assurance-maladie annonce que les résultats de la lutte contre la fraude des pharmaciens pour 2022 seront en forte augmentation au regard des procédures en cours. Quant au dispositif anti-fraude sur les médicaments chers, il sera mis en place dans le courant du mois.
Thomas Fatôme, directeur général de l’assurance-maladie, tient d’abord à rappeler que « la fraude est le fait d’une petite minorité » de professionnels de santé, mais qu’il n’est pas question pour autant de fermer les yeux. Au même titre que l’accès aux soins, l’accompagnement des professionnels de santé et la prévention, la lutte contre la fraude est donc une mission importante de l’assurance-maladie « en qualité de gestionnaire d’un système universel de protection sociale et de fonds publics très importants avec plus de 230 milliards d’euros de dépenses de santé par an ». Le préjudice s'élève ainsi à 2,2 milliards d’euros, « détectés et stoppés depuis 10 ans » avec une montée en charge régulière pour atteindre un maximum la seule année 2019 : 286,7 millions d’euros.
Malgré le coup d’arrêt provoqué par la crise du Covid, la dynamique des actions de lutte contre la fraude reprend fortement en 2022. Le plan développé par la CNAM « ne priorise pas tel ou tel type de fraude » et vise donc indifféremment les assurés, les professionnels de santé, les établissements ou les employeurs. Mais force est de constater que près des deux tiers des fraudes détectées (64 %) se concentrent chez les professionnels de santé, « ce qui est logique puisque ce sont eux qui génèrent de la dépense », et en particulier dans quatre catégories : infirmiers, pharmaciens, transporteurs, fournisseurs de produits et de matériel de santé.
C’est dans ce cadre que l’assurance-maladie a lancé une série d’évaluations du préjudice financier par catégorie d’acteurs ou de prestations. L’enquête sur les infirmiers estime que ce préjudice est compris entre 286 et 393 millions d’euros (5 à 7 % des prestations de soins infirmiers remboursés), celle sur les médecins généralistes l’évalue entre 185 et 215 millions d’euros (3,1 à 3,5 % des actes remboursés), et enfin celle sur les transporteurs entre 145 et 177 millions d’euros (3,9 à 4,9 % des prestations remboursées). Les prochaines évaluations commenceront avant la fin de l’année et vont concerner les masseurs-kinésithérapeutes, les pharmaciens, les EHPAD et les acteurs de l’hospitalisation à domicile.
Sans attendre cette évaluation, Thomas Fatôme souligne que les résultats de la lutte contre la fraude des pharmaciens pour 2022 vont « fortement augmenter » puisque l’assurance-maladie a procédé au contrôle de plus de 300 pharmacies suspectées de facturer des tests antigéniques (TAG) sans les avoir réalisés ou délivrés à des professionnels de santé. « Ces procédures se poursuivent, on a déjà identifié 54 millions d’euros d’indus frauduleux, deux ou trois pharmacies ont des procédures pénales déjà bien engagées avec des conséquences comme la fermeture, le déconventionnement, etc. Donc des fraudes qui vont pour certaines dater de 2020 se retrouveront dans les résultats de 2022, à cause d’une petite minorité de pharmaciens. »
L’assurance-maladie précise par ailleurs que le dispositif anti-fraude sur les médicaments onéreux (plus de 300 euros), prévu par la convention pharmaceutique et qui reposera sur la vérification de l’authenticité des ordonnances par le pharmacien, sera bien mis en place dans le courant du mois d’octobre. Si les discussions sont encore en cours avec les syndicats, Thomas Fatôme est confiant. « Nous souhaitons être plus efficaces dans la lutte contre la fraude tout en garantissant absolument la continuité des soins et donc la continuité de la dispensation des médicaments, y compris dans les maladies chroniques. Le principe est que, quoiqu’il arrive, et c’est inscrit à la convention, le pharmacien doit pouvoir dispenser le conditionnement minimal pour éviter tout risque de rupture. Nous sommes actuellement en train de répondre ensemble à la question de savoir ce qu’est le conditionnement minimal. »
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