Le Quotidien du pharmacien.- Que pense NèreS de la communication récente de l'ANSM au sujet de la pseudoéphédrine ?
Luc Besançon.- Ce qui est important pour nous, c'est que la communication soit équilibrée. Pour les patients, la notion de rareté au niveau des effets secondaires est difficile à comprendre d'autant plus qu'ils n'ont pas d'éléments de comparaison avec d'autres médicaments. Or, comme chacun sait, il y a des risques d'effets secondaires avec tous les médicaments. Les cas, rares, d'effets secondaires observés avec la pseudoéphédrine (AVC, infarctus du myocarde) sont concentrés sur des personnes ayant des antécédents. Le risque est donc surtout pour ces patients-là et c'est vers eux qu'il aurait fallu communiquer en priorité. Est-ce que le message a bien particulièrement ciblé cette catégorie de patients ? Je n'en ai pas vraiment l'impression.
Comment peut-on expliquer que l'ANSM ait pris cette position avant de connaître les conclusions du PRAC** ?
Ce qui étonnant c'est que c'est l'ANSM n'attend pas les résultats de cette enquête alors qu'elle l'a elle-même sollicitée. Ce travail du PRAC vise à la fois à évaluer le lien entre la pseudoéphédrine et ces cas d'effets secondaires, mais aussi à déterminer si son rapport bénéfices-risques est encore favorable. Ces conclusions sont attendues pour fin novembre, début décembre. Il n'y avait donc pas d'urgence à communiquer sur cela mi-octobre, six semaines avant la remise du rapport, d'autant plus que personne n'a signalé une augmentation récente du mésusage sur ces produits. Les AMM étant nationales, l'ANSM a le loisir d'en retirer une si elle le souhaite, comme elle l'a fait il y a peu avec la pholcodine. Dans le cas de la pseudoéphédrine, elle n'a pas décidé de le faire, le rapport bénéfices-risques reste donc en l'état favorable mais l'agence dit dans le même temps aux pharmaciens de ne pas en dispenser… Si les conclusions du PRAC ne rejoignent pas l'avis de l'ANSM, c'est la crédibilité de cette dernière qui est à risque. Pourquoi l'ANSM a-t-elle décidé d'agir ainsi ? Il n'y a qu'elle qui peut répondre à cette question.
Quelle est la position des autres pays européens sur ce sujet ?
Là encore, il faudra attendre les résultats de l'enquête du PRAC pour répondre précisément à cette question. Ce que l'on peut dire dès aujourd’hui, c'est qu'aucune agence nationale dans les autres pays de l'Union européenne n'a mis en place une politique visant à réduire la consommation de la pseudoéphédrine comme l'a fait l'ANSM en France.
Les alternatives à la pseudoéphédrine (notamment les huiles essentielles) ne posent-elles pas elles-mêmes certains problèmes ?
En effet, certains produits comme les huiles essentielles peuvent également entraîner des complications. Si elles sont mal utilisées, si le patient ne respecte pas les dosages, cela peut irriter les parois de la muqueuse par exemple. C'est pour cela qu'il est important de s'appuyer sur le conseil du pharmacien, y compris pour des produits hors monopole.
* NéreS est une organisation professionnelle représentant les laboratoires pharmaceutiques qui produisent et commercialisent des produits de santé et de prévention de premier recours disponibles en pharmacie sans ordonnance.
** PRAC (Pharmacovigilance risk assessment committee), comité de pharmacovigilance au niveau européen.
A la Une
Gel des prix sur le paracétamol pendant 2 ans : pourquoi, pour qui ?
Salon des maires
Trois axes d’action pour lutter contre les violences à l’officine
Gestion comptable
Fidéliser sa clientèle ? Oui, mais pas à n’importe quel prix
Portrait
Jérémie Kneubuhl : le pharmacien aux 50 millions de clics