Une pharmacienne de Nice (Alpes-Maritimes) est jugée pour plusieurs chefs d’accusation, dont le détournement de 726 312 euros à l’assurance-maladie via des surfacturations et des fausses ordonnances. Et elle n’en est pas à sa première fraude.
Marie-Anne R, 75 ans, ancienne pharmacienne titulaire à Nice (Alpes-Maritimes), a comparu le 27 septembre devant le tribunal correctionnel de Nice pour une importante série d’infractions au sein de son officine. C’est une inspection inopinée de l’agence régionale de santé (ARS) qui a mis à jour un « système de fraude généralisé », comme le qualifie le rapport. Médicaments non utilisés par des EHPAD replacés dans son stock, surfacturations à l’assurance-maladie, ordonnances falsifiées, délivrance de médicaments par des employés non habilités, compte courant d’associés débiteur de 150 000 euros… Au total, onze chefs d’accusation ont été retenus contre la titulaire. Pour l’assurance-maladie, le préjudice s’élève à 726 312,78 euros, rapporte le média « Monaco Matin ».
Le procureur accuse la prévenue d’avoir « foulé les principes tant moraux, légaux que déontologiques » de la profession et recherché le profit « au-delà de toute autre considération ». La pharmacienne retraitée, qui a été radiée à vie par l’Ordre des pharmaciens, admet « des erreurs » non voulues. « Il nous arrivait de faire des échanges standards : des personnes âgées préféraient prendre un traitement en poudre plutôt qu’en comprimés, ce qui a pu provoquer une distorsion de stock », explique-t-elle, se présentant comme une cheffe d’entreprise surinvestie avec « des salariés indociles. »
Une des employées de la pharmacie, présente en tant que coprévenue, décrit une titulaire « très autoritaire » et « colérique ». La pharmacienne, qui a entre-temps vendu son officine 1 million d’euros, est accusée par l’acquéreur d’avoir artificiellement gonflé son chiffre d’affaires, ce qu’elle dément.
Devant l’ampleur des faits, le procureur demande une peine de trois ans de prison, dont 18 mois assortis d'un sursis probatoire de trois ans et 100 000 euros d’amende ainsi que le remboursement des montants détournés. Pour la coprévenue, il a requis une peine d'un an de prison avec sursis et une amende de 5 000 euros. La défense, qui dénonce des réquisitions « trop rugueuses », demande une dispense de peine, puisque « le compte courant d’associés a été rapidement crédité » et affirme que la pharmacie a été vendue « à un prix raisonnable ». Le jugement, mis en délibéré, sera rendu dans quinze jours.
L’affaire interpelle d’autant plus que ce n’est pas la première fois que la septuagénaire se retrouve devant le tribunal. En 2007, elle avait été épinglée pour un trop-perçu de 300 000 euros. Puis, en 2020, elle a été condamnée en appel à six mois de prison avec sursis pour vente illégale de masques et de gels : la pharmacienne, refusant de fournir les EHPAD, infirmiers et médecins en masques sous prétexte de rupture de stock, les vendait 4,50 euros l’unité aux patients. Par ailleurs, elle fabriquait et revendait du gel hydroalcoolique non conforme, composé à partir de gel utilisé pour les échographies.
Selon un rapport de l’assurance-maladie, 330 millions d’euros de fraude à la Sécurité sociale étaient imputables aux professionnels de santé en 2023, dont 60 millions d’euros liés à des infractions commises par les pharmaciens.
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