LE CHOC est énorme. Marie-Christine Hodeau, la victime, était connue de tous comme une belle jeune femme, sympathique et toujours prête à aider son prochain. Les circonstances du drame soulignent en outre son immense courage. Du coffre de la voiture où da Cruz l’avait enfermée, elle a réussi, grâce à son téléphone portable, à appeler la gendarmerie qui a aussitôt déclenché une battue pour la retrouver et qui a arrêté le suspect, sur les indications de Mme Houdeau au sujet de l’automobile. Hélas, c’était trop tard. Les premiers constats scientifiques montrent en outre que Marie-Christine Hodeau a résisté à son agresseur, qu’elle s’est battue. Son entourage et l’ensemble de la population n’en sont que plus consternés.
Jeudi dernier, Nicolas Sarkozy a reçu les membres de la famille de la victime. Les sentiments recueilis dans la région de Milly par les journalistes vont de la rage à la douleur, de la colère à la révolte. L’impression que les citoyens honnêtes ne sont pas protégés, que la force brutale peut annihiler la vie d’une innocente, aimée de tous de surcroît, que l’injustice, en quelque sorte, domine le fonctionnement de la société contemporaine ont donné un prolongement moral et politique à ce fait-divers. La classe politique est tombée dans le piège que lui tendait l’indignation populaire : elle s’est crue obligée d’avoir un avis. Elle aurait mieux fait de se taire.
Le chagrin des Français n’a pas réussi, en effet, à noyer la démagogie. Chaque idéologie a proposé un coupable, comme si le seul coupable n’était pas l’assassin. Le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, a rapidement mis en cause les juges d’application des peines, contraignant la garde des Sceaux, Michèle Alliot-Marie, à déclarer que son collègue n’était pas suffisamment informé. Aussitôt, elle l’a rencontré pour lui démontrer que Manuel da Cruz n’a été remis en liberté qu’après avoir satisfait à toutes les conditions de sécurité exigées par la loi, ce qui, pourtant, ne saurait satisfaire la famille de Mme Hodeau. L’ancienne ministre socialiste de la Justice, Elisabeth Guigou, a dénoncé la « démagogie » de M. Hortefeux, sans se demander si le déclenchement d’une nouvelle bataille politique et la stigmatisation de la droite au pouvoir étaient judicieux. Interrogés, des magistrats ont expliqué, très rationnellement, que le risque zéro n’existe pas, que les juges d’application des peines réclament toutes les informations nécessaires sur l’état mental du détenu, sur sa dangerosité, sur sa volonté de se réinsérer dans la société, avant de le remettre en liberté. Bien entendu, ajoutent-ils, le risque zéro n’existe pas et sur de nombreux cas, un individu incapable d’échapper à ses pulsions peut tromper la vigilance des juges et des psychiatres.
Risque zéro ou maximum ?
Le pire, dans un cas aussi scandaleux, c’est de se référer aux statistiques, de défendre une idéologie, et d’entrer dans un raisonnement qui oublie le sort atroce de la victime, la tragédie qui a causé sa perte tout en préservant les droits de l’homme qui lui a ôté la vie. Le risque zéro n’existe pas mais, pour Marie-Christine Hodeau, da Cruz représentait le risque maximum et la mort assurée. Pour elle, la castration chimique du condamné, la sévérité des peines, la beauté des chiffres qui indiquent une forte proportion de réinsertions sociales réussies sont nulles et non avenues. Ce n’est pas la faute des lois, ce n’est pas la faute des juges, ce n’est pas le résultat consternant de la querelle qui oppose les libéraux aux partisans de la répression, c’est la faute d’un assassin qui, de toute évidence, n’a jamais dominé ses pulsions, ne souhaitait pas s’en défaire et a su cacher le monstre qui l’habite aux meilleurs psychiatres. Devant tant de violence gratuite, tant de distance entre le criminel, bête incontrôlable, et sa victime, produit raffiné de la civilisation, les Français, assurément, vont réagir dans le sens d ’une intolérance encore plus grande pour la criminalité. La droite ferait bien de contenir un mouvement qui pourrait faire ressurgir le débat sur la peine de mort, au lieu d’aller dans le sens de la colère ; la gauche ferait bien de ne pas faire des déclarations qui, dans un tel moment, passeraient pour de l’indulgence à l’égard de l’assassin et de l’indifférence à l’égard de la victime.
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