Le Quotidien du Pharmacien.- Dès sa naissance, en mai 2008, Totum a inscrit la pharmacie clinique au premier rang de ses axes de développement. Comment expliquez-vous ce positionnement pour le moins inédit à l’époque ?
Mehdi Djilani.- Ce positionnement est avant tout lié au profil des pharmaciens à l’origine du réseau. Aujourd’hui entre la quarantaine et la cinquantaine, nous composions la première génération qui a bénéficié d’un enseignement en pharmacie clinique sur les bancs de la fac. Nos professeurs de pharmacologie, de pharmacocinétique et de pharmacodynamie, déjà à l’époque, nous enseignaient comment le pharmacien d’officine pouvait agir « au chevet du patient ».
Nous étions dès lors convaincus que l’officinal détenait un rôle important pour optimiser les choix thérapeutiques, communiquer sur la notion d’observance ou encore émettre un avis thérapeutique en interprofessionnalité. Cette option est apparue d’emblée lors de la création du réseau, parallèlement aux axes qui relèvent d’une vocation plus classique d’un réseau, l’organisation, le marketing… L’évolution de la pharmacie, depuis, nous a donné raison puisqu’aujourd’hui l’officinal est de plus en plus appelé à exercer dans le premier recours, en lien avec les autres professionnels de santé.
Vous ne vous êtes cependant pas arrêtés à ce postulat de départ et maintenant, depuis bientôt quinze ans, vous n’avez cessé de faire évoluer cette approche de la pharmacie clinique au sein du réseau.
Oui, tout à fait, nous avons voulu aller plus loin et nous en donner les moyens. Ainsi, nous avons recruté un directeur médicopharmaceutique, détenant une expérience dans le domaine hospitalier car, rappelons-le, la pharmacie clinique est née et s’est développée à l’hôpital, aux États-Unis et au Canada. Nous avons ainsi au cours de notre histoire atteint une étape supplémentaire grâce à notre système qualité. Il nous permet aujourd’hui d’introduire une notion de feed-back en pharmacie clinique. Ainsi, dans le cadre du TROD angine, nous avons prévu qu’un courrier type soit transmis au prescripteur. Autre étape décisive franchie par Totum, au travers d’un investissement financier et humain, notre étude sur les biomédicaments et plus récemment sur l’étude portant sur la dé-prescription des benzodiazépines.
Comment cette démarche originale d’un réseau est-elle perçue par l’écosystème de l’officine ?
Notre intérêt pour la pharmacie clinique a suscité beaucoup de curiosité et d’interrogations, alors que la majorité des réseaux cherchent surtout à développer les services et la communication sur les services. Pour nous, il s’agit de jouer un rôle scientifique et de mettre à profit nos connaissances. La deuxième source de curiosité est la question suivante : qu’est-ce que cela rapporte à Totum ? Certes, il n’y a aucune rétribution financière directe pour le réseau. Cependant, nous percevons des retours sur investissement de manière indirecte. Notre démarche a marqué l’importance du pharmacien dans l’écosystème et pérennisé son rôle de professionnel de santé. De sorte que l’impact de notre engagement en pharmacie clinique est positif de façon générale pour la profession. Or nous croyons que ce qui est bon pour la profession, l’est forcément pour Totum !
Est-ce à dire que les pouvoirs publics, les institutionnels y sont également sensibles ?
Il serait prétentieux d’affirmer que nous sommes totalement identifiés en tant qu’acteur de pharmacie clinique. Cependant, notre positionnement nous a permis lors de réunions et de débats, au sujet de notre étude observationnelle sur les biomédicaments, de faire entendre la voix des officinaux. Par ailleurs, la publication des résultats de notre étude dans des revues qui font foi a contribué à notre visibilité au sein des deux académies (médecine et pharmacie) et auprès des parlementaires impliqués dans les affaires sociales. Il y a désormais comme un « bruit de fond » sur nos initiatives. Et ce n’est pas seulement de la com !
Cette notoriété atteint-elle les laboratoires, partenaires privilégiés des réseaux ?
Nous avons des liens avec deux types de laboratoires. Nous entretenons bien sûr, comme tout réseau, des liens commerciaux avec des fabricants de parapharmacie, d’OTC et de compléments alimentaires. Avec d’autres, des laboratoires de médicaments de prescription, nos liens sont plus particuliers. Alors qu’ils sont par essence très orientés vers les prescripteurs, ces industriels ont de plus en plus tendance à se tourner vers nous avec, pour préoccupation première, le bon usage du médicament, axe sur lequel nous avons anticipé. Nous avons des relations particulièrement privilégiées avec les laboratoires et les prescripteurs dans le domaine des maladies rares.
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