« J’AI TOUJOURS cru que le rôle du pharmacien est d’accompagner le client dans son parcours de santé, affirme Sophie Houppermans, titulaire à Cappelle-en-Pévèle (Nord). C’est un travail de longue haleine, auquel il doit aussi associer son équipe de collaborateurs. » En 2013, elle avait convaincu vingt de ses confrères Giphar de participer à la Semaine du rein. Cette année, ces derniers ont été rejoints par l’union régionale des professionnels de santé (URPS pharmaciens) : soixante-quinze officines du Nord-Pas-de-Calais ont mené des « repérages » d’affection rénale auprès de leur clientèle. Les pharmaciens avaient auparavant reçu une formation de la part des spécialistes de Néphronor, le réseau régional des établissements publics et privés ayant une équipe consacrée à l’insuffisance rénale chronique. Sophie Houppermans leur avait aussi préparé un Power Point pour organiser l’accueil à l’officine.
« J’appartiens à la commission métiers de Giphar, et j’avais été contactée par Néphronor qui souhaitait élargir le dépistage aux officines, explique Sophie Houppermans. Le Dr Franck Bourdon, responsable de sa commission prévention, était inquiet, en effet, de constater que 40 % des patients venant consulter le néphrologue, étaient aussitôt dirigés en dialyse, faute d’un diagnostic suffisamment précoce. » Et de rappeler que le Nord Pas de Calais est la première région pour ces affections, avec 3 300 dialysés pour 4 millions d’habitants, une proportion supérieure d’un quart à la moyenne nationale. « La région compte beaucoup d’habitants de toutes origines, dont le métabolisme ne se satisfait sans doute pas des habitudes locales, il y a beaucoup de diabètes, beaucoup d’hypertensions. »
La Semaine du rein a eu lieu en mars, et tous les résultats ne sont pas encore traités. Un protocole avait été établi par Néphronor, adapté au logiciel Déclic qu’avaient développé deux pharmaciens Giphar. Il s’agissait de viser une clientèle potentiellement à risque, de lui proposer de regarder le taux de créatinine d’une récente prise de sang, de réaliser une recherche d’albumine dans les urines par un test de bandelette, et de la soumettre à un questionnaire. Ce dernier, anonyme, était ensuite envoyé à Néphronor à des fins épidémiologiques, mais, en cas de risque avéré, deux lettres étaient remises au client : une pour lui, une qu’il pouvait remettre à son médecin.
Aboutir à des suppositions.
« Le pharmacien ne prend pas le patient à son médecin, précise Sophie Houppermans. Le client vient à l’officine pour un rhume, le pharmacien le connaît, il est bien placé en matière de prévention, il peut remettre la personne sur un parcours de soin. Les critères d’inclusion définis pour le questionnaire concernaient l’âge, les antécédents, le diabète, l’hypertension, les traitements. Croiser ces éléments permet d’aboutir à des suppositions. Nous avons donc recruté les patients, puis leur avons proposé un rendez-vous. »
« Les critères d’inclusion des soixante-quinze pharmacies ont permis de repérer 457 patients, non suivis pour une maladie rénale, précise Fanny Maës, chargée de mission à l’URPS. Il leur a ensuite été demandé si leur médecin leur avait déjà parlé ou dépisté une maladie rénale. Après le questionnaire, l’étude de l’examen sanguin, et la bandelette urinaire, il apparaît que 62 personnes présentent un risque d’affection rénale (13 %). » Pour Sophie Houppermans, « il importe aussi de progresser dans notre approche des patients. En 2013, j’arrivais à 11 % de patients possibles. Avec plus d’expérience, je parviens à 37 % en 2014, dont le plus grand nombre est âgé de 77 ans ».
« On essaie de ne pas dramatiser la situation pour le client, tout en insistant pour qu’il aille consulter, reprend la pharmacienne. Nous leur avons remis une plaquette qui explique cette affection, indolore, mais très grave. Il est très nécessaire pour les professionnels de santé de parvenir à une harmonisation de leur discours. Le pharmacien est le premier contact du patient. C’est d’abord à lui de faciliter la meilleure prise en charge de la prévention. »
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