Rien ne distingue le pharmacien d’aujourd’hui de son prédécesseur. Son officine constitue, comme dans le passé, le point névralgique du parcours de soins du patient. À l’exception près que cette place est désormais consacrée.
Par la loi HPST tout d‘abord. « Le rôle qui lui était dédié historiquement par la prescription médicale et par le maillage officinal, a été formalisé par l’apparition en 2009 de nouvelles notions telles que l’éducation thérapeutique du patient, le pharmacien correspondant, le pharmacien de premier recours, des rôles qui confirmaient l’interpénétration de la profession avec d’autres acteurs de santé », retrace Alain Delgutte, président de la section A au Conseil national de l’Ordre des pharmaciens.
Extension du champ de compétences
La relance du DMP par l’État, le carnet de vaccination électronique, la prise en charge oncologique à domicile et les soins palliatifs ont, entre autres, contribué à introduire de nouvelles obligations de communication entre professionnels de santé, et, par conséquent, à faire monter le pharmacien d’un cran dans le parcours du patient.
Toutefois le titulaire n’en a pas terminé avec la prise de possession de ce territoire. Comme le décrit Alain Delgutte, l’interconnectabilité provoquée par la révolution numérique va renforcer le rôle de pivot du pharmacien qui aura à traiter un flux de données patient et une personnalisation croissante des traitements.
Sur le terrain, les pharmaciens sont prêts à relever ces défis. De fait, de multiples initiatives sur le territoire démontrent leur capacité à inventer de nouveaux moyens de communication avec les patients et les soignants. Auguste Laplace, titulaire à Vincennes et secrétaire général de l’URPS Ile-de-France, expose ainsi l’application « lien santé », mise en place dans la région. « Les patients ont ainsi dans leur poche les moyens de mieux dialoguer avec leur pharmacien et les autres professionnels de santé grâce à une dématérialisation de leurs ordonnances, leurs résultats d’analyse et les données sur leurs pathologies », expose-t-il. Une autre fonction, dont la mise en place a été incitée par les pneumologues, concerne le suivi de l'asthme. D'autres pathologies feront l'objet de prochaines versions.
Nouveaux maillons
Pour Thierry Hesnard, titulaire à Nogent-le-Roi (Eure-et-Loir) et président départemental du syndicat (FSPF), le rôle du pharmacien dans le parcours du patient ne doit toutefois pas se limiter à la maladie. « Le pharmacien doit également prendre sa place auprès des citoyens en bonne santé, grâce notamment à la prévention, le sevrage tabagique, la diététique du sportif, la lutte contre l’antibiorésistance… Il en a toute légitimité ».
Reste que, pour prendre toute son envergure, le pharmacien doit dépasser sa dimension de commerçant. C’est ce que lui conseille, en substance, le Dr Martial Olivier-Kœhret, médecin généraliste, ancien président du syndicat MG France. Il en va selon lui de la crédibilité d’une profession qui devra construire dans les territoires « les meilleures organisations locales qui soient avec les autres professionnels de santé, médecin, infirmier, pharmacien, kiné… ». « Il n’y aura pas d’intervention hiérarchisée. La coordination reviendra au plus dynamique d’entre eux », expose-t-il évoquant notamment l’exemple de la vaccination, le renouvellement des ordonnances ou encore le suivi de certaines pathologies comme l’HTA ou le diabète.
Selon lui, les pharmaciens doivent jouer leur meilleure carte pour se rendre visible dans le parcours de soins du patient. « Avant que d’autres prestataires ne s’en chargent », lâche-t-il, un rien provocateur. Le message semble reçu par les étudiants, bien décidés à ne pas se faire doubler. « Nous ne sommes pas là pour faire du business mais bien pour nous inscrire en tant qu’acteurs de santé dans la chaîne de soins », déclare sans hésitation Anthony Mascle, président de l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF). Il explique cette volonté - et cette nouvelle force - par le nouveau profil des étudiants qui, passés par la sélection de la Paces, n’avaient pas nécessairement la pharmacie comme première vocation. Au-delà de cet atout, il affirme que la crise que connaît actuellement la pharmacie d’officine est aussi une chance pour réinventer le métier. Et pour prendre de la hauteur afin de mieux suivre le patient dans son parcours.
D'après une conférence PharmagoraPlus
Marché de l’emploi post-Covid
Métiers de l’officine : anatomie d’une pénurie
Près de 45 fois plus de cas en 2023
Rougeole : l’OMS appelle à intensifier la vaccination en Europe
Pharmacien prescripteur
Après les vaccins, les antibiotiques
Logigramme, formation…
Le dépistage de la cystite en pratique