La ruralité n'effraie pas tous les jeunes pharmaciens ! Julien Adam et Maxime Pierre, l'un natif de Sainte-Mère-Église (Manche), l'autre de Flers (Orne), se sont connus sur les bancs de la fac, à Caen (Calvados), et ont cherché à reprendre ensemble une officine « plutôt en zone rurale ». Explorant dans le département de la Manche, ils ont trouvé la pharmacie d'Isigny-le-Buat, que Nicole Chaib cherchait à vendre depuis plusieurs années (cf. Le Quotidien, 7 septembre 2017).
La pharmacienne d'Isigny cherchait même depuis plusieurs dizaines d'années, mais depuis qu'elle avait largement dépassé l'âge de la retraite, son horizon ne s'éclaircissait pas. Deux obstacles venaient principalement contrarier son souhait : l'âge déjà avancé des deux médecins du bourg, qui ne travaillaient qu'à temps partiel, sans trouver de remplaçants, et un très grand logement (350 m2) incluant la pharmacie, et conditionnant le prix de vente.
Le maire d'Isigny, Erick Goupil, inquiet pour la population, est intervenu pour résoudre les deux problèmes. La commune a démarché et compte désormais trois médecins, dont l'un partira en retraite à la fin de l'année. Quant à la maison des Chaib, la commune l'a acquise, et loue l'officine aux deux jeunes titulaires. « Le prix de vente était trop élevé au départ, reconnaît Maxime Pierre, mais madame Chaib a accepté de le baisser, et nous avons étudié les facteurs de progression. La situation reste compliquée sur le plan médical : la commune compte 1 300 habitants, 3 000 avec les villages autour, un kiné, deux infirmières, un étiopathe, et donc deux médecins l'an prochain. » Sous-entendu, ce sera peu.
« Nous venons tous deux d'un milieu rural, complète Julien Adam, et nous ne sommes pas attirés par les centres commerciaux ! Nous avons vu le maire d'Isigny, qui avait peur pour la survie de la pharmacie. Il nous a « vendu » sa ville, et son appui a été capital. Sans lui, nous ne serions pas là aujourd'hui ».
Le médecin nouvellement installé a une cinquantaine d'années, et les deux pharmaciens travaillent donc sur le moyen terme. La désertification médicale sera-t-elle de nouveau en vue dans une dizaine d'années ? « C'est de plus en plus courant dans la région, reprend Julien Adam. On avait étudié la situation de quatre ou cinq pharmacies, qui auraient pu nous convenir. Dans tous les cas, se posaient des problèmes de médecins. Ils ne veulent pas sortir de la ville de leur fac. L'évolution des habitudes fait aussi que pour un médecin qui part en retraite, il faut deux jeunes pour le remplacer. »
Les deux jeunes pharmaciens, diplômés depuis six ans, ont été plutôt bien accueillis par des clients « qui avaient peur que la pharmacie disparaisse. Il nous faut maintenant créer de nouvelles habitudes, proposer de nouveaux produits, des prix », du matériel médical, de la parapharmacie, des produits pour enfants, de l'orthopédie. Maxime Pierre et Julien Adam cherchent aussi à mieux travailler avec les autres professionnels, comme déjà avec la kiné, qui s'est spécialisée en cancérologie. « Ça se passe aussi très bien avec les infirmières. Ensemble, nous pouvons créer une dynamique ! »
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