C’est l’un des dossiers chauds de la rentrée. Le premier ministre Édouard Philippe a consulté les partenaires sociaux (salariés et patronat) autour de la santé au travail et notamment sur le coût des arrêts de travail. L’enjeu est de taille : en 2017, les indemnités journalières (IJ) ont représenté 10,3 milliards d’euros (en hausse de 4,4 %).
Le chef du gouvernement a exclu la piste d’un transfert brutal du financement des arrêts courts de la Sécu vers les entreprises. Mais il entend trouver une solution pour limiter l’absentéisme des salariés. Dans son discours devant le MEDEF, Édouard Philippe a évoqué des prescriptions trop « compréhensives ». Et la ministre de la Santé Agnès Buzyn a expliqué que 15 % des arrêts étaient inappropriés et que le prescripteur « n’est pas celui qui paye »…
Les syndicats médicaux veulent aborder sereinement ce sujet récurrent avec leur ministre de tutelle. Mais pas question d’être ciblés. « Dans cette affaire, les généralistes ne doivent pas être les boucs émissaires », prévient le Dr Jacques Battistoni, président de MG France, qui rappelle que les médecins sont fréquemment contrôlés par les caisses maladie.
La FMF balaie l’hypothèse ministérielle de prescriptions « trop compréhensives », voire complaisantes. « Les forts prescripteurs sont très bien connus de l’assurance-maladie et ne sont qu’un petit pourcentage », assure le Dr Jean-Paul Hamon, évoquant une « provocation » du gouvernement. « C’est assez mal vécu par les généralistes car ce sont des consultations souvent longues, où on prend justement plus de temps pour écouter le salarié qui va mal », renchérit le président des Généralistes-CSMF, le Dr Luc Duquesnel.
Prévention en entreprise
En première ligne, les médecins de ville pointent du doigt la dégradation des conditions de travail. « Au-delà du fait que les salariés travaillent plus tard et terminent parfois leur carrière par un arrêt long, les problèmes de management et relations conflictuelles sont à prendre en cause. Or le médecin doit protéger le patient dans ces cas-là », explique le Dr Battistoni. Le recul de l’âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans contribue aussi au dynamisme des IJ, les seniors étant plus touchés.
Une constatation partagée par les autres leaders syndicaux. « L’urgence, c’est avant tout d’améliorer la médecine du travail et les conditions des salariés », martèle le Dr Hamon. « Il faudrait que les médecins du travail soient plus présents dans les entreprises pour faire de la prévention, quitte à partager certaines missions avec les médecins traitants », renchérit le Dr Luc Duquesnel.
Sans attendre les arbitrages, la CNAM continue de prendre le problème à bras-le-corps. Elle entend poursuivre « l’accompagnement des médecins forts prescripteurs » d’indemnités journalières (16 000 praticiens ciblés), avec un objectif attendu de baisse d’une journée pour chaque arrêt de travail – soit une économie de 90 millions d’euros l’an prochain.
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