Si l’expérimentation du cannabis thérapeutique a permis d’améliorer de manière notable la qualité de vie de milliers de patients, leur avis est teinté d’une certaine prudence. Car sans ajustements majeurs d'ici à l'année prochaine, la généralisation du cannabis médical en 2025 aura un impact très limité.
« Je connais une dizaine de patients qui ont réussi à entrer dans l’expérimentation et au moins une centaine qui n’ont pas pu y participer ! », déclare Mado Gilanton, présidente de l'association de patients APAISER S & C dédiée aux patients atteints de syringomyélie. « Le manque de place dans les centres anti-douleur obligeait les patients à se trouver au bon endroit au bon moment pour participer à l'expérimentation. Malgré toute leur volonté, certains n'ont jamais pu y entrer en 3 ans ! », critique-t-elle.
Valérie Védère décrit les nombreux défis qu'elle a dû surmonter pour accéder à l’expérimentation. « Le centre anti-douleur de ma ville avait déjà présélectionné ses patients et ne pouvait pas m’inclure. J'ai dû me tourner vers un centre de soins palliatifs, et il m’a fallu plusieurs mois de mails et de rendez-vous téléphoniques pour être intégrée. J’ai eu la chance d’y rencontrer un médecin qui a accepté de se former. Aucun autre, pas même mon médecin traitant, n’a pris le relais », raconte-t-elle.
Les pharmaciens impliqués, les médecins à convaincre
« Si l'initiation hospitalière reste la norme, les difficultés d'accès pour les patients perdureront. À l’avenir, il faudra que les médecins libéraux et généralistes puissent eux aussi prescrire, pour ouvrir les portes de l’expérimentation à plus de monde et alléger la charge de travail des structures de référence. Mais beaucoup associent encore le cannabis à la toxicomanie », constate Pascal Douek, médecin du sport participant à l’expérimentation en tant que patient et représentant de ces derniers auprès du premier comité scientifique temporaire de l’ANSM, en 2018. A contrario, « Les pharmaciens, à l’hôpital comme en ville se sont très bien emparés du sujet, et il n’y a eu aucune difficulté dans la dispensation », affirme Mado Gilanton.
En plus d’une extension de la primo-prescription aux médecins généralistes et libéraux, les patients souhaitent aussi un élargissement des indications. « Sur les 3 millions de Français atteints de maladies rares, 300 000 d’entre eux pourraient bénéficier du cannabis médical », rappelle Mado Gilanton. L’arrivée de nouvelles galénique est aussi demandée, comme des capsules molles ou des sprays nasaux. « Les huiles seules ne suffiront pas, surtout depuis la suppression des fleurs à vaporiser, qui étaient indispensables pour soulager rapidement les crises de douleurs soudaines. Une galénique variée sera mieux adaptée aux besoins des patients », conclut le Pr Pascal Douek.
D'après une conférence organisée par l'Union des industriels pour la valorisation des extraits de chanvre (UIVEC).
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