« Vos officines sont-elles prêtes à faire face aux bouleversements liés à la prochaine réforme de la santé, mais aussi à la fin programmée du prix unique des prescriptions et au renforcement des ventes en ligne ? » Ouvrant ainsi le traditionnel Forum économique du syndicat des pharmaciens allemands, qui vient de se tenir à Berlin, les responsables de la profession appellent leurs confrères à bien se préparer à l’approche d’une période difficile, qui les obligera à associer innovation et imagination.
Comme c’est le cas depuis plusieurs années, le nombre d’officines en Allemagne a poursuivi sa baisse en 2018, pour atteindre 19 423 le 31 décembre 2018, soit 23,4 pour 100 000 habitants, autant qu’à la fin des années 1980. De plus, les chiffres présentés par les responsables économiques de l’ABDA, l’association fédérale des pharmaciens, confirment que ce sont les officines les plus petites, de même que les filiales de pharmacies, qui sont le plus touchées par les fermetures, tandis que le fossé entre les chiffres d’affaires des petites et des grandes officines ne cesse de se creuser. C’est donc clairement la répartition des pharmacies dans les régions les moins riches, et les moins densément peuplées, qui souffre le plus de ces évolutions. De même, le chiffre d’affaires des petites pharmacies a baissé l’an dernier, et progressé chez les plus grandes, pour s’établir en moyenne à 2,38 millions d’euros. 61 % des officines se situent toutefois en deçà de ce chiffre, et le résultat net, lui, a baissé en euros constants pour la deuxième année consécutive, après trois années de forte hausse, pour atteindre 129 173 euros.
Briser le lien entre distribution et rémunération
Selon l’ABDA, les données 2019 devraient stagner à un niveau comparable, avec le même environnement économique et une poursuite de la progression rapide des ventes en ligne : celles-ci ont représenté 13,6 % des boîtes et 17 % du chiffre d’affaires des OTC (toutes pharmacies en ligne confondues, allemandes comme étrangères), et 1,1 % des boîtes, soit 1 % du chiffre d’affaires des prescriptions. Face à cette menace, les pharmaciens doivent donc enfin « briser le lien entre la distribution de médicaments et leur rémunération ».
Les pharmaciens ont en effet abandonné, contraints et forcés, leur demande d’interdiction des ventes de prescriptions en ligne depuis l’étranger, dont le maintien a été exigé par Bruxelles. L’Allemagne va toutefois interdire les rabais sur les prescriptions pour les médicaments prescrits aux assurés dépendant des caisses publiques, l’équivalent de notre régime général de Sécurité sociale. En revanche, ils resteront possibles pour les assurés privés, soit un peu moins de 15 % de la population.
Comme l’a rappelé le président du syndicat des pharmaciens, Fritz Becker, cet abandon comporte des contreparties et peut même être vu comme une « chance » pour réorganiser la rémunération sur de nouvelles bases. En effet, en « échange » du renforcement prévisible des ventes en ligne, les pharmaciens négocient avec le gouvernement une « loi sur les officines de proximité », qui prévoit notamment la rémunération de nouveaux services en les déconnectant des ventes de médicament. Dans un premier temps, ils concerneront les vaccinations à l’officine, mais aussi les renouvellements d’ordonnances. Par ailleurs, les pharmaciens ont été chargés de piloter le groupe de travail qui présentera, d’ici à janvier prochain, les dispositifs et logiciels nécessaires à la mise en place, dans un an, des ordonnances électroniques. Reste que bien des « pharmaciens de base » doutent de ces mesures et continuent de manifester haut et fort leur inquiétude.
Une situation qui n'est pas sans rappeler celle de la France…
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