Le revirement du gouvernement sur le port du masque en population générale a déstabilisé l’officine, déjà mise à rude épreuve depuis des jours par l’obligation d’une distribution contingentée et insuffisante aux professionnels de santé.
Les nouvelles missions temporaires mises en place dans la lutte contre l’épidémie de Covid-19 sont nombreuses à l’officine. Mais la plus difficile dans sa mise en œuvre est sans nul doute la distribution des masques de protection aux professionnels de santé. Parce que les livraisons n’ont pas été réalisées dans les conditions espérées et surtout, les masques sont arrivés en nombre très insuffisant pour répondre à la demande légitime des professionnels de santé concernés. Sans même parler de ces professionnels exclus de ce contingentement drastique, ou de patients fragiles ou encore atteints du Covid-19 qui ne peuvent en bénéficier.
Une situation largement dénoncée dans les médias et sur les réseaux sociaux, et encore ce week-end par la diffusion de « la lettre ouverte d’une pharmacienne » de Jocelyne Wittevrongel à l’intention des élus du département de l’Indre, où elle exerce : « Ce jour, j’ai reçu 50 masques pour 14 professionnels de santé de mon canton. Malgré nos demandes, les préparateurs de nos officines, qui sont des professionnels de santé comme nous, ne sont pas prévus. Pensez-vous que 50 masques vont nous suffire ? Pensez-vous réellement que nous arriverons à nous protéger et de ce fait assumer auprès de la population notre rôle avec cette aumône ? Ma colère est ce jour proportionnelle à mon désarroi et à mon angoisse pour tous mes confrères et ce quelle que soit leur profession. »
À cela s’ajoute le revirement des autorités sanitaires et du gouvernement sur le port du masque en population générale. Il y a déjà 10 jours, les interventions du Premier ministre et du ministre de la Santé le laissaient présager en évoquant les masques alternatifs en cours de test et dont la production pouvait monter en puissance massivement. C’est désormais entériné. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) est ainsi revenue sur sa doctrine vendredi : si les masques FFP2 et chirurgicaux doivent être réservés aux soignants, elle préconise l’usage de masques alternatifs, « même artisanaux », par le reste de la population pour limiter la propagation du virus par aérosol. Vendredi également, l’Académie de médecine recommandait le port obligatoire d’un masque destiné au grand public « pendant et en sortie du confinement ». Vendredi toujours, le directeur général de la santé (DGS) Jérôme Salomon a incité au port du masque alternatif en population générale.
Une volte-face mal interprétée qui a poussé de nombreux patients, munis d’une prescription médicale, à exiger que les pharmaciens leur remettent des masques chirurgicaux. Face à l’ampleur du phénomène, la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) a diffusé samedi une lettre d’information pour confirmer aux confrères que ces masques restaient bien réservés aux professionnels de santé, déplorant que les pharmaciens soient une nouvelle fois « en porte-à-faux vis-à-vis des patients ». Une mise au point également réalisée par l’Ordre des pharmaciens sur son site et les réseaux sociaux : oui le pharmacien doit refuser de délivrer des masques aux patients, même sur présentation d’une ordonnance, car un ordre de réquisition pour les professionnels de santé les y oblige. Il est passible de sanctions s’il ne s’y plie pas.
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