Assise devant son bureau, Karine relit ses notes à haute voix :
- Je résume : nous leur expliquons la situation, et nous leur annonçons que la pharmacie sera en grève le 30 mai. Ceux qui veulent nous accompagner à la manifestation…
- Elle aura lieu où la manif ?, demande J-C.
- On ne sait pas encore.
- J’espère que les pharmaciens sauront être solidaires. Si on n’est pas tous ensemble dans ce mouvement de contestation, le gouvernement ne va pas nous prendre au sérieux.
- Tu sais parfaitement que l’unité de la profession est utopique. Mais j’ai le sentiment que cette grève sera très suivie. D’après les sondages, neuf pharmacies sur dix seront fermées.
Un léger coup sur la porte interrompt la conversation des titulaires.
- Entrez, répond Karine.
Tous les membres de l’équipe se retrouvent dans le bureau. Marilyne, Nicole et Alice s’installent sur la banquette, sous le serment des apothicaires. Marion pose une chaise près du fauteuil roulant de Kenza. Lou et Maëlys se faufilent et s’assoient près de la fenêtre. Emmanuel et Théo préfèrent rester debout, adossés contre la porte. Bien que ne travaillant pas aujourd’hui, Gisèle et Christèle ont accepté de venir, curieuses de connaître la décision des titulaires.
- Merci à toutes et tous d’être restés pendant votre pause méridienne. Comme vous le savez, un appel à la grève a été lancé par nos syndicats, pour défendre plusieurs causes : premièrement, défendre la sécurité des patients alors qu’une nouvelle menace plane sur le monopole pharmaceutique. Deuxièmement, défendre le réseau officinal très fragilisé, explique Karine.
- Les propositions de l’assurance-maladie ne répondent pas du tout aux besoins économiques. Pour faire simple, on en demande toujours plus aux pharmacies sans pour autant améliorer la rémunération. Alors que les médecins ont négocié une énorme revalorisation de leurs prestations, les pharmaciens ont l’impression d’être la cinquième roue du carrosse, s’emporte J-C comme s’il était en train de réciter un discours militant. Mais quand on l’attaque, la pharmacie contre-attaque !
- Le mouvement de protestation a déjà commencé par la pétition que nous faisons signer aux patients. Le 30 mai sera une journée sans service pharmaceutique en France. La Pharmacie du Marché sera fermée.
- Ok, vous faites grève. Et nous ?, demande Emmanuel.
- Justement, c’est la raison de cette petite réunion. Vous avez le choix d’accompagner le mouvement de grève, et de venir avec nous pour manifester. On aura les détails dans la journée. Vous pouvez aussi ne pas faire grève. Dans ce cas, vous venez à la pharmacie…
- La pharmacie sans patients… La journée va être longue, répond le préparateur militant d’un ton provocateur.
- Et si on fait grève, on ne sera pas payés ?, s’inquiète Nicole.
- Nous avons décidé de maintenir les salaires cette journée-là. Emmanuel, pour répondre à votre question, je pense qu’il y a suffisamment de travail en back-office pour travailler une semaine entière sans ouvrir la pharmacie.
- Je sais déjà ce que je ferai : ranger la réserve !, s’exclame Christèle.
- Mais j’insiste : cette grève n’est pas uniquement celle des titulaires. Si on continue à détricoter le réseau officinal, ce sont des milliers d’emplois qui vont disparaître, ajoute Karine. Qu’est-ce que vous comptez faire ?
(à suivre…)
Excédés par les vols et la fraude à l’ordonnance
Des pharmaciens marseillais créent un groupe d’entraide sur WhatsApp
Cas de comptoir
Douleur et fièvre au comptoir
Gestion comptable
Fidéliser sa clientèle ? Oui, mais pas à n’importe quel prix
Portrait
Jérémie Kneubuhl : le pharmacien aux 50 millions de clics