Déjà dans son rapport de décembre 2013, l’Autorité de la concurrence avait été la première à constater la situation difficile de la répartition pharmaceutique. Depuis, les rapports se sont succédé : l’IGAS en 2015 et 2017, la Cour des comptes en 2017, et ce nouvel avis de l’Autorité de la concurrence rendu public le 4 avril.
Tous appellent à la refonte profonde du système de rémunération des grossistes-répartiteurs afin de la dissocier des prix des médicaments. L’Autorité de la concurrence souligne en effet que la rémunération actuelle « ne semble plus, à structure constante, leur permettre de faire face aux coûts logistiques de leur activité ». Elle note aussi que la marge des grossistes-répartiteurs français « dans le prix de vente du médicament remboursable, est l’une des plus faibles d’Europe (2,3 % du prix de vente moyen en officine en 2017) » alors même que leurs obligations de service public font partie des « plus exigeantes » et donc des « plus coûteuses ». L’Autorité cite en exemple la réforme de la rémunération des pharmaciens d’officine et propose de « faire reposer la marge de distribution en gros sur les volumes distribués par les grossistes ou à lui substituer un montant forfaitaire, modulé selon les spécificités de distribution du produit concerné (chaîne du froid, stupéfiant) ». Elle recommande au préalable une étude d’impact sur l’effet de telles mesures par l’assurance-maladie, craignant que ces modifications aient un effet contre-productif en renforçant la prévalence de la vente directe.
Échanges constructifs
Emmanuel Déchin, délégué général de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP), souligne que c’est le 5e rapport à aboutir aux mêmes constats sur la situation critique du secteur et la nécessité de réformer le système de rémunération. Or rien n’a bougé depuis le premier rapport de l’Autorité de la concurrence fin 2013. « Ces conclusions rejoignent ce que nous disons depuis un certain temps, nous sommes donc en phase. Pour la première fois, l’Autorité de la concurrence évoque plusieurs pistes de modifications de la rémunération des grossistes-répartiteurs, elle montre ainsi l’urgence de la situation. » Les discussions sont en cours sur ce point avec le ministère de la Santé. « Nous avons eu des échanges constructifs. Deux réunions sont prévues courant avril », précise Emmanuel Déchin.
La CSRP ne souhaite pas s’étendre sur les autres points développés par l’Autorité de la concurrence. Néanmoins, concernant la vente de médicaments sans ordonnance en grande surface et en parapharmacie, Emmanuel Déchin tient à souligner que « nous ne voyons pas d’un œil favorable les initiatives qui pourraient nous faire perdre des flux de médicaments, même s’il ne s’agit pas des flux les plus importants ». Les grossistes-répartiteurs sont dans une situation économique qui ne leur permet pas de laisser échapper « 100 millions de boîtes multipliées par 30 centimes ».
Aujourd’hui le secteur affiche un chiffre d’affaires de 17 milliards d’euros, en recul de 10,5 % en 10 ans. Il enregistre des pertes d'exploitation significatives : -23 millions d'euros en 2017, -46 millions d'euros en 2018… alors qu'il gagnait 200 millions d’euros en 2008. La marge commerciale n’a fait que se réduire depuis 2008, avec une nette accélération en 2012. En cause ? L’impact colossal des baisses de prix massives sur les médicaments, une rémunération inadaptée qui engendre des ventes à perte sur le générique et les médicaments innovants, une contribution élevée indexée au chiffre d’affaires au titre de la maîtrise des dépenses de santé d’environ 200 millions d’euros chaque année, et un niveau de ventes directes échappant au secteur se maintenant autour de 32 % en volume.
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