ENTRE pharmaciens d’officine et vétérinaires, le climat n’est pas apaisé. Les premiers - par la voix des représentants de la pharmacie rurale, notamment - reprochent aux seconds la main mise qu’ils opèrent sur la dispensation de toute une partie des médicaments de prescription dédiés aux animaux. Des traitements que les cabinets vétérinaires délivrent à l’issue des consultations, mais qu’ils dispensent aussi à toute personne venue renouveler la prescription. Or l’officine pourrait parfaitement assurer ces ventes au même titre que les professionnels de la santé animale. « La pharmacie doit pouvoir proposer une médication simple et claire, capable de répondre aux symptômes fréquents de l’animal, remarque Albin Dumas, président de l’Association de pharmacie rurale (APR). Sur le circuit officinal, on a du mal à disposer d’une pharmacopée innovante avec des formules efficaces et facilement administrables. » Car ces médicaments, généralement soumis à une prescription médicale obligatoire, sont essentiellement distribués par le vétérinaire. « La législation est verrouillée dans ce domaine et elle avantage le vétérinaire qui reste le principal dispensateur pour la majeure partie du marché, liée à l’ordonnance. Nous demandons que tous les produits qui permettent de soigner les pathologies courantes des animaux - troubles digestifs, contraception - changent de statut pour passer sous prescription médicale facultative, en particulier certaines spécialités antiparasitaires innovantes qui restent listées. Le public en a besoin, la santé animale y trouvera son compte et les troubles bénins seront mieux pris en charge. »
Toutefois, si un grand nombre de spécialités vétérinaires sont encore délivrées sur ordonnance, force est de reconnaître que le marché voit s’assouplir peu à peu ses conditions de dispensation. En 2007, le décret « prescription délivrance » autorisait le renouvellement de la délivrance des principaux traitements préventifs, donnant ainsi au pharmacien la possibilité d’élargir son activité vétérinaire. Plus tard, en 2012, la liste d’exonération des substances vénéneuses pour chats et chien était révisée attribuant à certains vermifuges le statut de médicaments de prescription médicale facultative.
Le dynamisme des APE.
Les antiparasitaires externes, pour leur part, bénéficient sous certaines conditions d’une dérogation qui autorise leur distribution dans la plupart des circuits (animalerie, jardinerie…) et ce malgré l’AMM dont ils font l’objet. « Seule » ombre au tableau des assouplissements, les contraceptifs qui ont récemment réintégré le monopole vétérinaire. Mais, au final, la part du circuit pharmaceutique sur l’ensemble du marché a plutôt tendance à progresser, même si l’évolution, de 5,13 % en 2011 à 5,9 % en 2013, reste modeste. La profession vétérinaire pour sa part occupait 78,6 % - devant l’industrie et les groupements, à 15,2 % - d’un marché qui, en 2013, pesait près de 1,4 milliard d’euros, petfood compris (source AIEMV* - prix grossistes hors taxes). Un total auquel les vaccins et les anti-infectieux, bien qu’en régression, contribuent le plus largement, alors que les antiparasitaires internes et les insecticides/ectoparasiticides affichent des progressions de plus de 6 %.
En pharmacie, deux familles de produits vétérinaires dominent le marché : les antiparasitaires externes (APE) dont les ventes ont gagné près de 15 % en valeur, et les antiparasitaires internes (vermifuges) en évolution de plus de 4 %. Leur dynamisme nourrit l’essor d’un rayon qui, au total, a progressé de 7,5 % en valeur les douze derniers mois. Au moins deux leviers engendrent cette croissance : les conditions météorologiques, d’une part, puisque les saisons chaudes favorisent la prolifération des parasites (l’été dernier plutôt clément et l’arrière-saison presque chaude ont donc encouragé les épisodes d’infestation) ; l’évolution des comportements, d’autre part, joue en faveur du marché avec un animal familier aujourd’hui considéré comme un membre à part entière de la famille, et, de ce fait, de plus en plus médicalisé. Un autre facteur et non des moindres vient encourager le phénomène. La population de nos compagnons à poils, plumes et écailles affiche une belle stabilité avec pas moins de 63 millions d’individus dont 56 % de poissons, 18 % de chats, 12 % de chiens, 10 % d’oiseaux et 4 % de rongeurs (source FACCO**/TNS Sofres 2012).
Pour Nathalie Lévy, en charge de la gamme Frontline chez Merial, les antiparasitaires externes représentent une porte d’entrée facile à ouvrir pour tout pharmacien qui désire investir le marché vétérinaire. Simples et très demandés, ces traitements ont un effet moteur pour l’ensemble du rayon, particulièrement de mars à octobre, période propice aux parasites. Centrée sur le traitement et la prévention des tiques et des puces avec deux lignes classiques Frontline (Spot-On et Spray), la gamme cible aussi l’environnement de l’animal avec Frontline Combo. Le nouveau Frontline Tri-Act, disponible dès le mois de janvier, se destine pour sa part à protéger les chiens lors des sorties en plein air grâce à son effet répulsif contre les tiques et les moustiques.
Saisonnier.
Le début de l’année sera aussi l’occasion pour la gamme Vetoform (Dazont) de présenter trois shampoings Bio (antiparasitaire, usage fréquent pour chien, lotion sans rinçage pour chat). Formulée à base d’extraits végétaux, la marque (antiparasitaires externes, vermifuges, traitement de l’habitat, compléments alimentaires, soins des yeux et des oreilles) revendique son positionnement sur le créneau du naturel qui lui permet de se différencier face à la concurrence. Un axe dont elle souligne le succès, notamment auprès des mères de famille qui redoutent la présence de substances chimiques dans l’environnement proche des enfants. L’évolution, pour tout le rayon vétérinaire, serait toutefois bien plus forte si les produits étaient exposés en libre accès. C’est le constat que fait le Laboratoire Dazont à la suite d’une étude, réalisée en 2012, portant sur l’accessibilité des produits vétérinaires en pharmacie : 63 % de la population interrogée se serviraient plus volontiers auprès d’un rayon en libre accès, sachant qu’un achat sur quatre de soin et d’hygiène de l’animal est effectué sur le circuit.
Autre segment en pleine expansion, les produits de traitement de l’environnement ont vu leurs ventes progresser de 42 % en valeur. Les cas de gale qui se développent chez l’humain peuvent expliquer les demandes accrues en produits pour traiter l’habitat car ils couvrent aussi les infestations dues au microscopique acarien. Chez Biocanina (Vetocentre), les ventes du segment ont été multipliées par deux. La marque exclusive au circuit pharmaceutique, capitalise cependant sur tout le soin de l’animal à l’aide des 80 produits que compte sa gamme. Présente sur les segments des antiparasitaires externes et internes, elle couvre aussi les besoins en hygiène, soins des yeux/oreilles, les troubles digestifs, la dermatologie (démangeaisons), le comportement (mal des transports), la reproduction et les compléments (articulations, nervosité, surpoids…). Des brochures d’information pour expliquer l’univers animal et encadrer le conseil des produits sont fournies aux pharmaciens par la marque qui propose aussi une formation à la bonne dispensation des médicaments vétérinaires. Chez Bayer, on trouve des antiparasitaires externes pour chien (Advantix à large spectre), pour chat (Advantage), pour chiens et chats (collier Seresto) mais aussi des vermifuges (Drontal) et un traitement de l’environnement (Advanthome). Clément Thékan propose une offre large couvrant le domaine des antiparasitaires (Fiprokil et Insectifuge Naturelle), des vermifuges, de la reproduction, de la dermatologie, des troubles digestifs, de l’hygiène, des soins et des compléments alimentaires. Novartis Santé Animale, pour sa part, a centré son offre sur les antiparasitaires et les insecticides, alors que Virbac répond notamment aux problèmes de parasites, d’hygiène bucco-dentaire et corporelle, et de dermatologie (allergies, infections cutanées, nettoyage auriculaire).
**Chambre Syndicale des Fabricants d’Aliments Préparés pour Chiens, Chats, Oiseaux et animaux familiers.
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