Cancérologie

L’immunothérapie destinée aussi aux plus âgés

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Publié le 24/09/2021
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Les plus de 65 ans sont souvent écartés des traitements anticancéreux par immunothérapie, déplore l'Académie de médecine. Sans doute est-ce par peur d'une moindre efficacité de cette stratégie et d'un risque plus élevé d'effets secondaires ? Pourtant, ce n'est pas ce que montrent les dernières études évaluant l'immunothérapie en traitement du mélanome.

Les immunothérapies ont bouleversé la cancérologie. Dans cette nouvelle approche thérapeutique, il ne s’agit pas de s’attaquer directement à la tumeur, mais de stimuler les cellules immunitaires impliquées dans la reconnaissance du cancer et sa destruction.

À l’heure actuelle, une vingtaine de cancers différents sont susceptibles de répondre à l’immunothérapie. Malheureusement, cette dernière n’est efficace que chez 20 à 40 % des patients. D’où l’importance de bien identifier les patients répondeurs. Néanmoins, lorsqu’elle est efficace, l’immunothérapie vient révolutionner la prise en charge : elle peut « induire des réponses de longue durée, voire des rémissions complètes sur plusieurs années après arrêt de l’immunothérapie, amenant à requalifier certains cancers en maladie chronique », avance l’Académie de médecine.

Mais bien souvent, les patients âgés en sont écartés. « En effet, l’immunothérapie leur est prescrite avec beaucoup de réserve, alors que plus de 50 % des patients d’oncologie ont 75 ans et plus. Cette défiance est basée à la fois sur l’a priori d’une moins bonne tolérance et la notion d’une efficacité moindre », regrettent les Sages. Et aussi du fait que rares sont les essais cliniques menés sur les plus de 65 ans, exclus du fait de leur âge ou de comorbidités.

Le mélanome à l'étude

Pour l’Académie de médecine, les personnes âgées doivent elles aussi avoir droit à l’immunothérapie, car elle est efficace chez les seniors. Pour preuve, les Sages avancent l’exemple de l’immunothérapie dans le traitement du mélanome, utilisée depuis plus de 10 ans. « Deux grandes études, portant sur 5 265 et 10 669 patients, montrent que les patients de plus 65 ans répondent aussi bien à l’immunothérapie que les patients plus jeunes avec une survie sans rechute et une survie globale identiques, quelle que soit l’immunothérapie prescrite (ipilimumab, anti-PID-1, voire anti-PDL-1) sans plus d’effets secondaires », relate l’Académie. De plus, une étude de 2021 menée en vie réelle confirme que l’efficacité de l’immunothérapie est similaire chez les plus âgés par rapport au reste de la population traitée et, surtout, qu’il n’y a pas plus d’effets secondaires sévères ou différents.

Ainsi, la réponse à l’immunothérapie n’apparaît pas influencée par l’immunosénescence et l’incidence des maladies auto-immunes induites par ce traitement n’est pas plus élevée chez les personnes âgées. « Ces informations sont d’autant plus importantes que l’immunothérapie cible maintenant des tumeurs comme le carcinome épidermoïde cutané avancé et la tumeur de Merkel, qui sont des tumeurs cutanées des personnes âgées de plus de 70 ans », évoque l’Académie. Ces résultats soulèvent aussi la question de « la prescription d’une immunothérapie en situation adjuvante chez une personne âgée. Ainsi, dans le mélanome, il a été montré que le traitement adjuvant par anti-PD-1 diminuait le risque de rechute après curage ganglionnaire ». Dans ce contexte, l’évaluation gériatrique est indispensable pour s’assurer, avant d'envisager une immunothérapie, de l’absence d’interférence avec certaines comorbidités, des conditions mentales, émotionnelles ou nutritionnelles du patient. Et elle permet de bien définir le rapport bénéfice/risque du traitement.

Charlotte Demarti

Source : Le Quotidien du Pharmacien