UN TABLEAU CLINIQUE d’allure maniaque, avec désinhibition, sensation de puissance intellectuelle et physique, euphorie, logorrhée, idées de grandeur, augmentation de l’énergie, de l’estime de soi, de l’activité motrice, de la libido, signes qui s’associent à une insomnie, une tachypsie et à une tachycardie, doit évoquer une prise aiguë de cocaïne. À la période euphorique succède le syndrome de sevrage dont les manifestations à l’opposé (anhédonie, ralentissement psychomoteur…) conduisent à l’ardente envie de retrouver l’état antérieur et de reprendre le produit.
La coca, d’où est extraite la cocaïne (alcaloïde) est cultivée principalement en Amérique du Sud (Colombie pour 61 %). La production mondiale augmente et l’Europe est la deuxième destination, avec ses 3,3 millions de consommateurs (6,5 millions en Amérique du Nord). Les saisies ont doublé entre 2005 et 2006, mais leur progression correspond pour une part malheureusement « à l’augmentation de l’offre de cocaïne sur le marché européen ». Le crack correspond à de la cocaïne base, obtenue après adjonction de bicarbonate de soude.
Le « niveau d’expérimentation », ou usage au moins une fois au cours de la vie, dans la population générale est le plus élevé parmi les produits illicites stimulants. Il a triplé entre 2000 et 2005, il atteint 2,6 % chez les personnes de 15 à 64 ans ; il est maximal chez les 25-34 ans : 4,1 %.
La dépendance commence généralement par un simple usage récréatif, mais tend à dégénérer avec le temps vers un désordre invétéré de consommation à rechutes, d’une redoutable chronicité.
Maladie du cerveau.
On peut considérer cette addiction comme une véritable maladie du cerveau, que les progrès récents de l’imagerie cérébrale et de la biologie moléculaire permettent de mieux appréhender. En résumé, la cocaïne a des effets psychoactifs et addictifs en agissant essentiellement sur le système mésocorticolimbique cérébral, un ensemble de régions interconnectées qui a une action régulatrice sur le plaisir, la récompense et la motivation. La dopamine est le principal neuromédiateur, mais n’est pas le seul : sérotonine, noradrénaline.
Par ailleurs, de vestes études épidémiologiques ont démontré que le risque de développer une addiction à la cocaïne ou à une autre drogue est en grande partie génétique, qui compte pour environ 50 % ; ce degré d’héritabilité dépasse largement celui de bien d’autres affections considérées comme hautement transmissibles (HTA, diabète de type 2…). À cela s’ajoute chez certains individus le facteur stress, dont le mode d’action demeure mystérieux. Le traitement de l’addiction à la cocaïne associe des moyens pharmacologiques et psychothérapeutiques, ces derniers étant très utilement combinés aux médicaments ; différentes formes de thérapies comportementales ont fait la preuve de leur efficacité. Quoiqu’aucun médicament n’ait été officiellement approuvé dans le traitement de cette dépendance, « les progrès des connaissances neurobiologiques ont permis d’identifier des médicaments dont les effets neurobiologiques suggèrent qu’ils seraient susceptibles d’aider les patients. Plusieurs de ces médicaments ont déjà donné des résultats dans des essais cliniques contrôlés ». On peut citer dans le traitement du sevrage : la N-acétylcystéine, le modafinil, le propranolol (hors AMM). Dans la prévention des rechutes, les médications prometteuses sont essentiellement les agents gabaergiques, le disulfirame, le modafinil et l’aripiprazole (hors AMM). Un « vaccin anticocaïne » est en cours d’évaluation chez l’homme.
de médecine par Charles Haas
(membre de l’Académie de médecine), Laurent Karila (hôpital Paul-Brousse)
et William Lowenstein (Boulogne-Billancourt).
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