L’APPARITION récente de bactéries multirésistantes insensibles à la plupart, voire à tous les antibiotiques disponibles, fait craindre un retour à l’ère pré-antibiotique. « Les antibiotiques sont naturellement présents depuis toujours dans l’environnement, rappelle le Dr Frédéric Laurent (hôpital de la Croix-Rousse à Lyon). À l’origine, ils étaient fabriqués par les bactéries pour se défendre contre les attaques d’autres bactéries, mais, pour ne pas être détruites par leurs propres antibiotiques, les bactéries ont appris à développer des résistances. À leur mort, ces mutations sont disséminées et transférées à d’autres bactéries. L’utilisation excessive et/ou impropre des antibiotiques en médecine a donc favorisé la menace d’une résistance croissante. »
Limiter la consommation d’antibiotiques est au cœur des programmes des différents organismes de santé. Cependant, le péril infectieux ne saurait être combattu sans le développement de nouveaux antibiotiques. Or la quasi-absence de nouveaux médicaments est patente. Entre 2000 et 2010, le nombre de substances antibiotiques à usage systémique disponibles en France a diminué de 18 %. Cet appauvrissement de l’offre thérapeutique restreint l’éventail des solutions de recours et menace le pronostic vital des patients par manque d’antibiotiques efficaces. Chaque année en Europe, on compte environ 25 000 décès consécutifs à une infection due à une souche bactérienne résistante aux antibiotiques.
Actuellement, les résistances touchent tous les types de pathogènes, l’exemple le plus marquant étant le cas emblématique du staphylocoque doré (S. aureus, ou SA). Cet agent est redoutable car il est colonisant, il se transmet facilement, il est très virulent et capable d’internalisation. Le staphylocoque est le pathogène le plus fréquemment rencontré dans les infections nosocomiales, avec une proportion importante de SARM (SA résistant à la méticilline). Il est également responsable de 30 % des infections communautaires. « La prévalence du SARM dans notre pays a diminué de 2001 à 2010, mais elle reste élevée. Par ailleurs, on constate l’émergence et la dissémination rapide de nouvelles souches de SARM d’origine communautaire qui représentent une vraie menace en ville, et qui pourraient gagner le milieu hospitalier, prévient le Pr Pierre Tattevin, infectiologue au CHU Pont Chaillou (Rennes). Même si, pour l’instant, elles sont peu prévalentes en France, il est primordial non seulement de faire face à l’épidémiologie actuelle des infections nosocomiales, mais aussi d’anticiper les évolutions possibles. »
Une nouvelle céphalosporine.
Les bêtalactamines ont longtemps été le traitement de référence des infections à SAMS (SA méticilline sensibles), la pénicilline M. agissait en se fixant sur les protéines de liaison à la pénicilline (PLP) de la paroi bactérienne. Malheureusement, on est passé du SAMS au SARM, constate le spécialiste du Centre national de référence des staphylocoques. En effet, le staphylococcus aureus est maintenant capable de produire des enzymes PLP2a qui empêchent cette fixation, d’où la résistance croisée du SA à toutes les bêtalactamines.
Le staphylocoque résistant ou non à la méticilline est, avec le streptocoque, l’agent pathogène le plus fréquemment impliqué dans les infections compliquées de la peau et des tissus mous (ICPTM). Les ICPTM constituent un problème clinique majeur, associant une morbidité, une mortalité et des coûts de santé considérables. Leur caractère de gravité se situe entre l’érysipèle hospitalisé et la fasciite nécrosante, véritable urgence médico-chirurgicale.
En raison de la quasi-absence de nouvelles molécules actives contre le SARM, la vancomycine restait le traitement de première ligne. Aujourd’hui, Zinforo (ceftaroline) est la seule céphalosporine enregistrée en Europe pour les ICPTM, avec une efficacité clinique démontrée sur le SARM. Administrée en perfusion IV, elle est réservée à l’usage hospitalier. La molécule a été spécifiquement conçue pour avoir une forte affinité pour les PLP naturelles de nombreuses espèces sensibles, mais aussi pour les PLP spécifiques associées à la résistance, notamment celles du SAMR (PLP2a). Ce qui explique pourquoi, contrairement aux autres bêtalactamines, elle présente une activité contre cette souche difficile à traiter.
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