DANS LA MESURE où « la démarche s’effectue pour le bien du patient » et où les acteurs de santé, quelle que soit leur activité, y trouvent leur compte, la coopération entre professionnels de santé ne peut qu’être encouragée : certes, elle est aussi, du point de vie des pouvoirs publics, également sous-tendue par un souci de rationalisation des dépenses de santé. Mais, sur le fond, il y a déjà de nombreuses années, résume Lilian Brosse (ARS Rhône-Alpes) que la démarche est « officiellement encouragée, au plus haut niveau, et ce de façon constante ». Déjà, en 2002, le rapport du Pr Yves Berland sur la démographie médicale préconisait d’accélérer certains transferts de tâches et d’accroître les coopérations entre certaines spécialités médicales et paramédicales : force est, hélas, de constater aujourd’hui qu’encouragement (des nouvelles pratiques, coordinations et transferts de tâches), et lucidité (sur les solutions à utiliser pour faire face à la raréfaction de l’offre médicale et pharmaceutique), ne signifient pas forcément évolution des mentalités et des pratiques quotidiennes. Dix ans après les conclusions du rapport Berland, les transferts de tâches restent embryonnaires et les freins culturels à toute idée de coopération demeurent puissants dans le système de santé hexagonal. Malgré une évaluation jugée positive de quelques expérimentations lancées ça et là, « les pratiques, en la matière, n’ont guère évolué… », regrette-t-il.
Coordination « ancrée dans le terrain ».
Pharmacienne du principal service d’hospitalisation à domicile (HAD) de la région, l’association Soins et Santé, Véronique le Maréchal témoigne, de son côté, que d’une certaine façon la « coordination » se pratique au quotidien depuis des années. Avec les généralistes, les spécialistes de ville, les oncologues, les infirmiers et… les pharmaciens d’officine. Sans difficulté particulière. Comment pourrait-il en être autrement lorsque sa structure d’HAD prend en charge quotidiennement entre 200 et 260 patients, et que, avec ses deux confrères, elle assure quelque 25 000 livraisons de médicaments à domicile et environ 137 000 dispensations nominatives ?
Pour autant, concernant les officinaux, seuls le savoir-faire des professionnels et la qualité de leurs liens avec les acteurs de santé de leur environnement sont à même de garantir le succès d’une expérience de coopération : pour le représentant de l`ARS, tout nouveau projet de coordination ne « peut s’imaginer qu’ancré dans le terrain », véritable condition sine qua non de sa réussite. Et de son autorisation par les autorités. Car le législateur a, d’une certaine façon, verrouillé le dispositif : malgré cet ancrage nécessaire dans un environnement local spécifique, il revient aux initiateurs d’une nouvelle expérimentation de remplir un dossier adressé à la Haute Autorité de santé (HAS). Et c’est seulement si l’avis de la HAS est positif qu’elle transmet alors le dossier à l’agence régionale de santé concernée, seule à même de délivrer l’autorisation finale.
Ce qui est vrai pour les médecins l’est-il aussi pour les pharmaciens ? Seul l’avenir le dira, « mais c’est vraiment aux pharmaciens de saisir l’opportunité qui leur est offerte de faire bouger les lignes », conclut le porte-parole de l’ARS. Certes, les possibilités d’évolution n’ont été que récemment ouvertes et ce n’est qu’à partir de 2008, avec les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS), puis surtout en 2009 avec la loi HPST et avec l’article L.1411 du code de la Santé publique, que le cadre législatif et les outils de la coopération ont été véritablement finalisés. « Coordination et coopérations nouvelles seront sans doute l’apanage des nouvelles générations », pouvait conclure Laurent Montreuil, l’un des organisateurs de la soirée…
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