Les enseignements tirés de la première vague (report d'opérations, décalages de traitements type radiothérapie et chimiothérapie, etc.) ont été « source de structuration », détaille le Pr Jean-Yves Blay, président d'UNICANCER, et ont poussé la filière à s'organiser en amont d'une seconde crise.
« On prépare un plan en cas de forte tension afin de gérer les opérations chirurgicales, notamment en créant des coopérations entre les établissements publics ou des cliniques. Il faut penser aux chirurgies complexes comme le pancréas ou le poumon. Il faut des équipes : chirurgien, infirmier. On travaille dessus », insiste le Pr Axel Kahn, président de la Ligue contre le cancer.
Autre axe de travail : les dépistages systématiques (cancer du sein et colorectal) et le retard de diagnostic qui suscitent de fortes inquiétudes. La peur de contracter le virus du Covid-19 amène certains patients à repousser les consultations de diagnostics. « À peu près 50 % des diagnostics de cancer que l'on s'attendait à faire pendant cette période n'ont pas été faits. Un retard de diagnostic de deux à trois mois peut être géré [...]. Mais si ces retards sont de 4, 5 ou 6 mois, les chances perdues seront incontestables », précise le Pr Kahn.
Une augmentation de la moralité entre 2 à 5 % à 5 ans
Les résultats de l’étude pilote GROUVID* réalisée par l'institut Gustave Roussy montrent que l’inquiétude des patients quant à la contamination et leur venue plus tardive dans les centres de soins pourrait se traduire par une augmentation de la mortalité par cancer entre « 2 et 5 % à 5 ans ».
Reste que le secteur doit composer avec la fatigue chronique des équipes. Sur le pont depuis plus de six mois, UNICANCER reconnaît que « la charge de travail ne s'éteint pas ». Les conclusions du Ségur de juillet dernier ont fait des déçus. Les médecins des centres de lutte contre le cancer (CLCC), sous statut ESPIC (privé non lucratif), ont été exclus de la revalorisation de l'indemnité d’engagement de service public exclusif (IESPE) réservée à la fonction publique hospitalière.
Pour UNICANCER, qui souhaite une meilleure attractivité des carrières, c'est un coup de massue. « Il y a une attente forte des médecins sur le recrutement et la fidélisation. On a du mal à recruter des radiologues ou des anesthésistes, la profession considère que leur exercice exclusif de service public doit être reconnu », analyse Sophie Beaupère, déléguée générale d'UNICANCER. Une réunion avec le ministère de la Santé est prévue dans les prochaines semaines.
*ESMO 2020 - A microsimulation model to assess the impact of SARS-CoV-2 on cancer outcomes, healthcare organization and economic burden, Institut Gustave Roussy.