- Je n’ai pas besoin de votre pitié et encore moins de votre aide. Les temps sont durs mais je vais rebondir, dit Louna Ridoux en tapotant les épaules de son fils comme pour enlever de la poussière qu’il n’y a pas.
- Madame Ridoux, nous sommes surpris c’est tout. Depuis quand vivez-vous ici ?, demande Marion.
- Depuis fin août. C’est un peu comme des vacances qui se prolongent. La caravane, la forêt… Hein mon chéri !, répond la femme en serrant le petit bonhomme contre elle.
- Nous ne voulons pas vous mettre en retard…
- Oui vous avez raison. Il y a école. Le petit ne mange plus à la cantine…
Les explications sont inutiles. Marion et Julien ont compris. Alors que les pharmaciens s’éloignent, Louna Ridoux les interpelle une dernière fois :
- S’il vous plaît, est-ce que vous pouvez rester discrets ? J’ai tellement peur qu’on me retire le petit. Cette caravane, elle vaut ce qu’elle vaut mais nous avons un toit et un lit douillet.
- Vous pouvez compter sur nous. Vous cherchez du travail c’est bien cela ?, demande Julien.
- Oui. Je cherche depuis que l’usine a fermé. Des ménages, de la manutention, tout. Je prends tout.
De retour à la pharmacie, Julien file prendre une douche ; une salle d’eau est aménagée dans la salle de pause, à l’étage. Marion est rentrée chez elle. Elle ne reprend son service à la pharmacie qu’à 15 h 00. L’un et l’autre se demandent comment aider Louna Ridoux. Lorsqu’il descend dans le back-office, Julien est tiré de ses pensées par la voix de J-C :
- Tu étais où ? Nous avons rendez-vous avec le comptable et le juriste pour les papiers. Tu ne te souviens pas ?
- Si, si. Mais nous avons rendez-vous à 14 h 00…
- Et il est 14 h 15. Bon, ne t’inquiète pas. Béber le comptable est en retard comme d’habitude, le rassure J-C. Attends-moi dans le bureau, je dois voir un truc avec Christèle.
La préparatrice est devant l’ordinateur du back-office et sourit au titulaire qui s’approche d’elle :
- Alors, vous avez résolu votre problème ?
- C’est un peu complexe mais je crois que oui. En résumé, je vais répondre aux parents que Beyfortus peut être remboursé pour leur enfant. Mais ce qui me surprend c’est que leur pédiatre n’a donné aucune consigne alors que le petit est prématuré…
- De toute façon, Synagis ne convient plus si comprends bien. Donc il ne reste que Beyfortus. Quoiqu’il en soit, il faut protéger le gamin. Ok, je vous laisse appeler les parents et le médecin traitant. C’est qui d’ailleurs ?
Le titulaire regarde sur le dossier informatique quand Kenza arrive en agitant une ordonnance :
- Celle-là, je suis quasiment sûre que c’est une ordonnance falsifiée. Du tramadol et de la codéine…
- Fais voir ça ?, dit Christèle.
J-C regarde par-dessus l’épaule de la préparatrice. Lorsqu’ils relèvent la tête, l’un et l’autre semblent penauds.
- Là, regardez, insiste Kenza en pointant du doigt. Vous croyez vraiment qu’une ordonnance établie à Menton aujourd’hui même puisse se retrouver entre nos mains à 14 h 15 ? Nous sommes à 8 heures de la Riviera. Il y a un loup, c’est sûr…
- Mais jamais je n’aurais pensé à ça…
- En plus, pas de carte Vitale. Reste quand même à appeler le pseudo-prescripteur pour confirmer. Vivement le 1er décembre, que l’ordonnance sécurisée soit obligatoire.
(à suivre…)