« L'idée est que, quand on parle ou tousse, on va rejeter des gouttelettes contenant du SARS-CoV-2. En réduisant la charge virale dans la salive, on limite le risque de contamination par ces gouttelettes », explique au « Quotidien » la Dr Florence Carrouel, du laboratoire Parcours santé systémique à la faculté de médecine Laennec de Lyon et première auteure de l'étude. Le SARS-CoV-2 est en effet identifié dans 91,7 % des prélèvements salivaires réalisés chez des malades.
Ainsi, les bains de bouches pourraient être considérés comme un outil prophylactique pour réduire le risque individuel de contamination. Toutefois, il n'existait pas encore d'expérience in vivo qui soutienne cette utilisation.
Une charge virale diminuée de 71 %
Les chercheurs lyonnais ont recruté 176 participants adultes ayant une forme asymptomatique à légère de Covid 19 traitée en ambulatoire depuis moins de 8 jours. Il leur a été fourni 200 ml de produit pour bain de bouche contenant de la ß-cyclodextrine et du citrox (bioflavonoïdes) ou un placebo. Le choix de ces deux principes actifs s'appuie sur leur activité antimicrobienne à large spectre, et en particulier contre le SARS-CoV-2 d'après la littérature. Le produit et le placebo ont été fournis par le laboratoire suisse Curaden spécialisé dans la santé bucco-dentaire. La consigne était la suivante : se laver avec la bouche chaque jour à heure fixe (à 9, 14 et 19 heures).
L'étude a commencé 4 jours en médiane après la confirmation par PCR d'un Covid-19. Un prélèvement salivaire a été réalisé le premier jour de suivi à 9 heures (juste avant le premier bain de bouche), à 13 heures et 18 heures Les 6 jours suivant, un seul prélèvement a été fait à 15 heures de l'après-midi.
Selon les données publiées dans « Clinical Microbiology and Infection », la réduction de la charge virale salivaire était plus importante, 4 heures après le bain de bouche, dans le groupe ayant reçu la lotion, comparé à celui ayant reçu le placebo. La présence de SARS-CoV-2, mesurée en logarithme décimale de copies par ml, était de 4,01 log10 copies/ml dans l'ensemble des patients de l'étude. Elle a diminué de 12,58 % entre le tout premier contrôle salivaire et le deuxième. « Quatre heures après le bain de bouche, la réduction de la charge virale est toujours de 71 % », précise la Dr Carrouel.
Au 7e jour, la charge virale avait diminué de 58,62 % dans le groupe traité et de 50,62 % dans le groupe placebo. La diminution de la charge virale observée dans le groupe placebo peut s'expliquer par la décroissance naturelle de la charge virale liée à l'histoire naturelle de la maladie ou par l'effet de certains excipients.
Avant une situation à risque
« Cette étude montre que le bain de bouche présente un intérêt dans les premiers jours de l'infection et a un effet plus modeste sur le long terme », résument les auteurs dans leurs conclusions. « Les bains de bouche peuvent être utilisés dans la population générale, où il peut y avoir des malades asymptomatiques, poursuit la Dr Carrouel. Si on est dans une situation où l'on doit aller chez le dentiste, faire un dîner en famille ou chez le médecin, on peut prendre un bain de bouche pour prévenir un éventuel risque de contamination pendant les 4 heures qui suivent. Les médecins ou les Ehpad peuvent aussi proposer du produit pour bain de bouche à l'entrée de leur établissement ou de leur salle d'attente. C'est une mesure barrière supplémentaire. »