Au moment du premier déconfinement en mai, Olivier Véran le répète, il faut « tester, tester et tester » pour identifier le plus précocement possible les personnes infectées et avoir une idée du nombre de personnes contaminées à l’échelle nationale. En mars-avril, seules les personnes hospitalisées, puis peu à peu les résidents des EHPAD peuvent en effet avoir recours aux tests RT-PCR.
La population générale et les pharmaciens sont encore loin d'imaginer qu'ils se retrouveront quelques mois plus tard avec un écouvillon dans le nez ou entre les mains, selon la catégorie à laquelle on appartient, dans un pays qui va parvenir à pratiquer plus de 2 millions de tests hebdomadaires au cours du mois d'octobre. Il faut dire que, dans un premier temps, les officinaux auront dû patienter de longues semaines avant d'avoir enfin le droit de réaliser les TROD sérologiques, évoqués dès le mois d'avril, mais qui ne feront leur apparition au comptoir que dans le courant du mois de juillet.
Trod sérologiques : une (trop) longue attente
Quelques jours après la parution de la liste des tests sérologiques homologués par le Centre national de référence (CNR), la présidente du Conseil national de l'Ordre, Carine Wolf-Thal, s'étonne de la situation dans les colonnes du « Quotidien » du 2 juin. « C’est ubuesque. Les tests validés sont connus, la Haute Autorité de santé est favorable à l’idée que les pharmaciens proposent des TROD Covid-19. Il ne manquait plus que l’arrêté et nous n’avons aucune idée de quand il sortira », déplorait-elle alors. Sans attendre qu'un arrêté ne les y invite, des pharmaciens commencent à proposer des TROD sérologiques à leurs patients, certains se faisant d'ailleurs rabrouer par le CNOP lui-même. Les syndicats dénoncent, eux, les manœuvres exercées par les biologistes pour freiner l'arrivée de ces tests en officine. « Il y a un véritable lobbying des biologistes médicaux pour exclure les pharmaciens de la pratique des TROD Covid., dénonçait Gilles Bonnefond en juin dernier. Ils mènent un combat qui est totalement inapproprié, déplorait-il. Pour les Français, il est maintenant naturel de venir se faire dépister en pharmacie. Il s’agit désormais de mettre en place une véritable stratégie de santé publique pour que nous puissions contribuer à mesurer l’immunité collective de la population. » C'est finalement le 15 juillet qu'un arrêté va officiellement permettre aux officinaux de se lancer. 50 000 TROD sérologiques seront réalisé au cours de l'été, mais alors que le nombre de contaminations augmente lentement mais sûrement à la rentrée, une autre catégorie de tests va rapidement les éclipser.
Et le test antigénique fut
Alors que les files d'attente devant les laboratoires font jaser, que des patients attendent parfois plus d'une dizaine de jours avant de savoir s'ils sont positifs, rendant de facto l'acte totalement inutile, l'exécutif doit trouver des solutions pour continuer à tester toujours plus et surtout de manière plus intelligente. Bien que moins fiables, surtout pour les personnes asymptomatiques, les tests antigéniques sur prélèvements nasopharyngés sont finalement recommandés par la Haute Autorité de santé. Infirmiers, médecins et bien sûr pharmaciens vont enfin pouvoir soulager des laboratoires submergés par la demande en permettant à des patients de savoir s'ils sont positifs ou non au Covid-19 à l'instant T. Dans des barnums sur la voie publique, dans leurs espaces de confidentialité, aidés par des étudiants et les préparateurs pour les prélèvements, plus de 30 % des officinaux vont s'investir pour cette mission chronophage et complexe à mettre en place, le tout quelques jours à peine après une campagne de vaccination antigrippale particulièrement sportive cette année.
À la mi-décembre, un peu plus du tiers des pharmacies françaises réalisaient ces tests rapides selon le ministère de la Santé. En tout, plus de 900 000 tests antigéniques avaient été effectués par les officinaux juste avant les fêtes de fin d'année, si l'on se base sur les chiffres d'IQVIA. Les résultats de ces tests ont été transmis dans un premier temps assez laborieusement à l'assurance-maladie avant que la plateforme Si-DEP¨ne soit rendue accessible aux officinaux dans le courant du mois de novembre. Quelques jours plus tard, suite à un nouvel avis de la HAS, les pharmaciens sont même autorisés à tester les cas contacts et les personnes identifiées au sein de clusters, peu après avoir obtenu le droit de proposer les tests antigéniques aux patients âgés de plus de 65 ans. Sur le front du Covid, le pharmacien a su réussir le test, reste à voir quelles nouvelles missions (ou épreuves selon l'interprétation de chacun) lui seront confiées pour lutter contre l'épidémie en 2021.