LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Le marché français du générique est-il arrivé à maturité ?
JEAN-MICHEL PENY.- Je ne le crois pas ! Quatre axes de croissance existent, dont trois sur lesquels le gouvernement peut agir. En premier lieu, et bien que le taux de pénétration des génériques au sein du répertoire soit déjà important avec 83,9 % observé en moyenne, en 2012, il est envisageable de le voir grimper jusqu’à 95 % à 96 %. Aller au-delà, en revanche, sera en pratique difficile. Par ailleurs, la création au sein du répertoire de groupes génériques pour les paracétamols ou pour des produits « essentiellement similaires » comme les antiasthmatiques est envisageable. Il en avait d’ailleurs été question lors de la préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2013. L’impact sur le périmètre du marché des génériques serait toutefois modeste. Enfin, il est possible d’encourager l’augmentation du taux de prescription par les médecins de produits au sein du répertoire plutôt que des « me-too » encore protégés par un brevet. C’est en effet chez les médecins que le réservoir de croissance du marché des génériques est le plus important. L’expiration des brevets des produits princeps est le quatrième facteur de croissance important, mais le gouvernement n’a pas de prise sur celui-ci. En outre, son impact varie selon le nombre de produits tombant dans le domaine public, leur niveau de chiffre d’affaires et, bien évidemment, selon la plus ou moins grande difficulté rencontrée par les pharmaciens pour les substituer.
Et les bio-similaires ?
La création d’un répertoire pour les bio-similaires qui autoriserait leur substitution par le pharmacien n’est pas à l’ordre du jour et serait déraisonnable. Il existe des différences importantes entre les produits biologiques et des modifications mineures dans leur procédé de fabrication peuvent entraîner des modifications importantes en termes d’efficacité et d’immunogénicité.
Est-ce à dire que le marché du générique, en France, pourrait devenir l’équivalent de celui de l’Allemagne ou de la Grande-Bretagne ?
Tout dépend de la politique qui sera menée. Si le gouvernement souhaite doubler le taux de pénétration du marché des génériques, pour se rapprocher des niveaux observés en Allemagne ou en Grande-Bretagne, il n’y a qu’une seule solution efficace : faire prescrire davantage les médecins au sein du répertoire. Car les pharmaciens ont fait leur part de travail avec des taux de substitution proches des 90 % ! Pour doubler le marché des génériques, il ne suffira donc pas de mettre en place des mesures incitatives à l’attention des médecins. Il faudra introduire des mesures coercitives, assorties de pénalités. Mais pour des raisons, à la fois politiques et culturelles, le gouvernement ne me semble pas prêt à prendre ce chemin.
Les baisses de prix peuvent-elles entraver cette croissance ?
Je ne pense pas que les baisses des prix appliquées aux princeps ou aux génériques puissent avoir un impact sur la dynamique de pénétration des génériques. En effet, elles n’influencent pas le comportement de prescription des médecins et n’ont pas d’impact sur le taux de substitution en officine. L’instauration d’un TFR (tarif forfaitaire de responsabilité), en revanche, peut ralentir, voire stopper la progression du taux de pénétration des génériques. Concernant la politique de prix que pourrait adopter le gouvernement, l’instauration d’un TFR d’emblée, dès l’arrivée des premiers génériques, est la « vraie » menace qui pèse sur les laboratoires princeps, les génériqueurs et les pharmaciens. Les génériques n’offriraient alors plus aucun avantage économique aux payeurs. Cette mesure risquerait donc de mettre en péril les génériqueurs qui ne sont déjà pas en très bonne santé. Une telle décision pénaliserait également les pharmaciens d’officine.
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