- Il faudra prendre le médicament à jeun, Madame. Ce soir de préférence. Vous dînez à quelle heure ?, demande Julien à la patiente.
- Vers 21 h 00. Donc je prends le sachet avant de manger ?
- Non, après. En fait, il faut respecter un délai de deux heures au moins avant ou après le repas…
D'accord. Et combien de jour de traitement ?, interroge la quadragénaire.
Pour Julien, l'administration de la fosfomycine en prise unique semble si évidente qu'il reste quelques secondes interloqué.
- C'est un traitement en une seule prise. Il n'y a qu'un seul sachet dans la boîte.
- Oh, j'avais oublié. Le médecin me l'avait dit en effet. Merci en tout cas pour toutes ces explications.
- Je vous en prie. Voici votre carte Vitale, l'ordonnance et le médicament. Un sachet ?
- Non, certainement pas. J'ai un grand sac à main, regardez.
Tout en parlant, la femme glisse la boîte de fosfomycine dans son sac à main et fait un petit geste de la main en guise d'au revoir.
Julien retourne dans le back-office, où sont réunis ses collègues autour de Juliette.
- Regarde Julien ce que m'a offert Juliette ! C'est trop trop beau, j'adore. On va te regretter Juliette, merci, dit Lou à l'ancienne adjointe.
Dans son élan de tendresse, la jeune apprentie se laisse aller à prendre les mains de Juliette.
- Bonjour les gestes barrières les filles !, s'amuse Damien en leur approchant un flacon de gel hydroalcoolique.
- Et tu commences quand chez Monsieur Thomas, lui demande Christèle.
- Ce n'est plus chez Monsieur Thomas, Christèle. C'est désormais la pharmacie de Mademoiselle Juliette Nicolas, la reprend Karine.
La sonnerie du téléphone retentit. Gisèle prend l'appel, avant de passer le combiné à Karine.
- Je prends la communication dans mon bureau, Gisèle. À bientôt Juliette, je viendrai te voir dans ta pharmacie. J'ai hâte, dit la titulaire en s'éloignant.
- Ça va pas être un appel facile à gérer. C'est Mme Moreau ; elle est persuadée que ses voisins maltraitent leur gamin, confie Gisèle à ses collègues.
- Elle m'en a déjà parlé en effet. Le problème, c'est qu'elle change d'avis tous les jours : un coup ses voisins sont maltraitants, un coup c'est le gamin qui est insupportable et qui mérite une bonne correction, ajoute Julien.
- Eh bien il n'y a pas cinquante solutions. En cas de suspicion de violence sur un mineur, il faut appeler le 119. Ce sont eux les experts, et ils sauront s'il faut mener une enquête ou non. Mais ne rien faire est puni par la Loi.
Tout le monde regarde Juliette.
- Comment tu sais ça toi ? Cette fille m'épate. Ca va être dur de te remplacer quand même, grogne gentiment J-C.
- En tant qu'élue ordinale, j'ai eu une formation avec une référente départementale. Il faudra qu'on organise un rendez-vous avec vous si le sujet vous intéresse. Elle est géniale, et maîtrise parfaitement le sujet.
La conversation se poursuit entre les membres de l'équipe, entrecoupée par les rares visites de patients qui défient le couvre-feu. Le soir, Julien rejoint Juliette chez elle. Le baiser d'accueil de la jeune femme surprend Julien.
- Laisse-moi parler Julien. Être coordonnateur à l'ARS va t'ouvrir de nouveaux horizons professionnels. Fonce ! Si on s'aime vraiment, notre couple peut survivre à cette distance physique.
- Mais, moi à la Réunion, toi ici, comment…
- Nous ne sommes plus des enfants. Nous pourrons prendre l'avion comme des grands, pour nous revoir régulièrement, répond Juliette en se serrant contre son amant.
(À suivre…)