La technique peut sembler barbare, à savoir un casque sur la tête, bardé d’électrodes fichées à même le cerveau… L’image évoque les débuts de la médecine psychiatrique et ses électrochocs. Réhabiliter les usages de la stimulation cérébrale profonde est pourtant l’objectif assumé de chercheurs genevois. Leurs travaux sur la souris se sont même vus récemment récompensés par le Prix Pfizer de la Recherche 2016.
Déjà expérimentée avec succès pour traiter les tremblements de malades atteints de Parkinson, l’électrostimulation à haute fréquence a néanmoins aussi montré ses limites. En effet, dès qu’on arrêtait la stimulation, les tremblements reprenaient. Pour les scientifiques suisses désireux d’appliquer la méthode au traitement des addictions, il fallait lever cet obstacle.
Partant du postulat que la drogue augmente la libération de dopamine qui, elle-même, dérègle le fonctionnement des synapses neuronales, ils ont eu l’idée de tester les effets de l’électrostimulation profonde chez des souris préalablement rendues cocaïnomanes. Premiers essais, premiers échecs, car l’effet de sevrage ne durait que quelques heures. Ils ont alors baissé la fréquence du courant électrique (10 à 15 Hz au lieu de 130 Hz), et obtenu de meilleurs résultats.
Mais une libération accrue de dopamine venait contrarier les effets du traitement en empêchant les synapses de revenir à un fonctionnement normal. C’est finalement en associant l’électrostimulation profonde à l’administration d’un médicament qui bloque la production du neuromédiateur que le sevrage a été obtenu.
Une semaine après un traitement de 10 minutes seulement, les souris ex-cocaïnomanes recevaient une deuxième dose de drogue à la façon d’un cobaye naïf. Leur mémoire était donc libérée du souvenir addictif qui est habituellement responsable des rechutes au terme du sevrage. À supposer que ce lavage électrochimique du cerveau des souris soit un jour transposable à l’Homme, la technique promet une avancée significative dans la lutte contre les toxicomanies.