SE RÉFÉRER aux exemples étrangers pour mettre en place une nouvelle disposition juridique ou réglementaire, l’idée n’est pas nouvelle, mais elle a du sens. Surtout lorsque les pays de comparaison ne sont pas si éloignés, géographiquement et culturellement, du nôtre. C’est ce que n’ont pas manqué de faire les représentants de la pharmacie d’officine français lorsqu’il s’est agi d’évaluer l’opportunité de réformer la rémunération du pharmacien. La nouvelle rémunération, agrémentée d’une touche d’honoraire, devrait donc faire son entrée dans les officines de l’Hexagone en janvier prochain. À la veille de cette petite révolution, il n’est pas inutile d’explorer les expériences étrangères qui disposent aujourd’hui d’un peu de recul sur une réforme comparable.
La base était sceptique.
C’est justement le cas de la Belgique, qui, en 2010, a mis en place une rémunération à l’honoraire pour ses pharmaciens. « Les conditions de la négociation qui nous a menés à l’honoraire étaient bien différentes des vôtres, souligne d’emblée Charles Ronlez, président de l’APB, venu témoigner de son expérience du dossier lors dernier Congrès national des pharmaciens. En 2006-2007, à l’époque où ce chantier a débuté, nous n’avions pas par exemple, contrairement à nos confrères français, le droit de substitution. » Il a aussi fallu convaincre les professionnels eux-mêmes. « La base était sceptique. » Mais surtout, se souvient Charles Ronlez, la neutralité budgétaire était la condition sine qua non du projet. « Il fallait que l’introduction de l’honoraire se fasse à budget constant pour l’autorité publique, pour le client et pour le pharmacien. »
Cette contrainte a-t-elle été surmontée ? « Mieux que ça, estime le président de l’APB, quatre ans après la mise en place de l’honoraire, l’autorité publique paye moins, le client paye moins et le pharmacien y gagne même un peu. »
Différence de taille avec la réforme française, l’honoraire est arrivé dans les caisses belges, en 2010, à hauteur de 80 % de la rémunération totale du pharmacien. « Aujourd’hui, par le jeu de l’indexation, ce taux s’élève même à 82,2 % », précise Charles Ronlez. « L’idéal, serait d’atteindre 85 %, rebondit Philippe Besset, vice-président de la FSPF*, s’inspirant de l’exemple belge. Mais ce sera dur pour nous, car nous ne partons pas de la même base… De plus, du fait de la marge dégressive lissée (MDL), les officines n’ont pas la même structure de produits, le même profil de ventes. » Si les pharmaciens belges semblent montrer la voie, celle-ci reste encore à construire.
D’après la conférence « La nouvelle rémunération » du dimanche 19 octobre lors du Congrès national des pharmaciens à Cannes-Mandelieu.