« AUX YEUX du public, l’acte de délivrance doit symboliser que le pharmacien n’est pas un simple épicier, mais un expert du médicament, doté d’un réel savoir. » D’emblée, Arnaud Leclerc a donné le ton du colloque du Collectif des groupements, organisé la semaine dernière au Sénat. Un ton offensif et délibérément tourné vers le patient. Car, selon ce professeur de sciences politiques à l’université de Nantes, « la reconnaissance de la valeur du conseil pharmaceutique par les pouvoirs publics nécessite préalablement d’obtenir le soutien des patients ». Un préalable que le directeur du laboratoire de recherche « droit et changement social » considère même comme incontournable pour réussir la transition et passer à l’ère de la pharmacie de services.
Des patients qui entendent bien être considérés comme « de véritables partenaires », et non plus comme de simples faire-valoir des acteurs de santé, a tenu à rappeler Éric Salat, représentant du Collectif interassociatif TRT5 (traitement recherche thérapeutique). « Alors que nous sommes censés être au cœur du système de santé, nous en sommes quasiment toujours tenus à l’écart », a ainsi expliqué cet expert de l’organisation des soins au sein de ce Collectif de recherche.
D’où la revendication des membres du TRT5 de ne « plus être de simples usagers du système de santé ». Dans cette optique, le collectif interassociatif entend conduire, en 2014 et 2015, des travaux au sein desquels « le patient chronique serait l’acteur de sa propre santé et de son propre parcours », a annoncé Éric Salat, en précisant que la Haute Autorité de santé (HAS) avait été saisie dans ce sens.
Un projet ambitieux.
Dans cette perspective, le TRT5 souhaite privilégier une approche pluridisciplinaire et réunir autour de la table l’intégralité des acteurs de santé, afin de rédiger un pacte de confiance santé pour les patients VIH, avec les pharmaciens d’officine comme tuteurs. Un projet ambitieux qui permettrait au TRT5 de collaborer avec la caisse nationale d’assurance-maladie (CNAMTS) pour faire établir et modifier la liste des actes et des prestations, et valoriser les services que les officinaux pourraient apporter aux quelque 950 000 patients concernés. « Un premier pas vers la reconnaissance par les payeurs du rôle central des pharmaciens dans la prise en charge du patient. »
Un rôle central que prône la Fédération internationale de la pharmacie (FIP), comme l’a rappelé son président, Michel Buchmann (lire interview ci-dessous). À charge pour les pharmaciens de se donner les moyens d’atteindre cet objectif en « développant les compétences nécessaires », a expliqué Ema Paulino, présidente de la zone Lisbonne et sud pour la FIP et membre de l’Ordre des pharmaciens portugais. Et cette évolution est d’autant plus importante que « l’accès à la molécule n’est pas suffisant pour garantir l’efficacité et la sécurité du traitement ». Il appartient donc aux pharmaciens de proposer des services complémentaires qui contribueront à leur reconnaissance comme experts du médicament et des pathologies chroniques.