- Marion, vous avez fait une commande en vaccins Covid hier ?, demande Karine.
La titulaire de la Pharmacie du Marché est assise devant l’ordinateur, un mug de thé entre les mains et un châle posé sur les épaules.
- Oui, un dernier flacon pour nous, et quelques flacons supplémentaires pour les professionnels de santé du secteur. Vous avez froid Karine ?
- Je suis frigorifiée. Le chauffage fonctionne ?
- Oui. Enfin je crois. Pour revenir à la vaccination Covid, les patients ne se bousculent pas mais j’ai préféré avoir un flacon d’avance. On pourra commander à nouveau à Pâques. C’est bizarre, les radiateurs sont froids, poursuit l’adjoint en passant la main sur l’appareil situé près d’elle.
- Ah ! Ce n’est donc pas ma thyroïde qui a des ratés, plaisante Karine. Vous avez entendu parler de cet homme, en Allemagne ? Il a reçu plus de 200 doses de vaccins et il va très bien. L’homme le plus vacciné de l’histoire (lire également en page 2)…
- En France, avec notre système d’enregistrement et de prise en charge, cela aurait été impossible.
- Quoique. Vous vous souvenez de Madame Junien ? Elle revenait toutes les semaines. Elle voulait être sûre d’être protégée. J’ai même appris qu’elle avait tenté d’être vaccinée dans d’autres pharmacies, raconte Karine.
Elle se lève et se dirige vers le programmateur du chauffage.
- Il y a un problème effectivement. J’appelle le chauffagiste. Après la croix, le… oh !
- Quoi ?
- Si ça se trouve, c’est le réparateur de la croix qui a détraqué la chaudière. Il a trifouillé quelque chose dans le compteur électrique… oh, tout ce temps perdu pour des bêtises, s’agace la pharmacienne. Je vais encore passer ma matinée à devoir gérer ces problèmes techniques au lieu de faire de la vraie pharmacie.
- J’ai besoin d’un pharmacien, les interrompt Emmanuel, une ordonnance entre les mains. Regardez. Ça me paraît beaucoup, non ?
Karine lit la prescription.
- Oui, c’est beaucoup mais c’est possible. Dans le cadre d’un sevrage tabagique, on peut monter les doses de nicotine.
- Je sais cela, mais des doses de cheval comme ça, jamais vu ! Quatre patchs quand même !
- C’est peut-être le protocole qu’il faudrait adapter. En commençant par deux patchs de 21 mg, plus des patchs de 7 mg pour trouver le bon dosage. Une sorte de titration, vous me suivez Emmanuel ? Il faudrait voir avec le prescripteur.
- OK, merci.
Christèle arrive à son tour dans le back-office.
- Moi aussi j’ai besoin d’une confirmation. Je peux remplacer par Medikinet, c’est bien cela ?, demande la préparatrice.
Karine lit l’ordonnance.
- Vous n’arrivez pas à avoir le médicament prescrit ? Chez aucun des grossistes ?
- Non, il est manque fabricant partout.
- Et sur Vigirupture ?
- La première qui en détient encore est à 40 km.
- Alors dans ce cas, on applique le protocole de l’ANSM, confirme la pharmacienne titulaire.
- C’est bien que l’ANSM émette ces recommandations. Ça nous facilite la vie, commente Marion.
- Oui c’est très bien. Mais le mieux serait de ne pas avoir à modifier le traitement. Surtout avec des médicaments comme le méthylphénidate.
- En tout cas, vous venez d’avoir votre quart d’heure pharmacie ! Bravo.
- C’est vrai, et j’en reprendrai bien une dose de plus.
- Non. Maintenant, c’est l’appel au chauffagiste la priorité.
(à suivre…)