Quinze ans après l’adoption d’un premier dispositif ministériel élargissant le champ de compétence des officines pour améliorer la qualité de la santé de proximité et désengorger le circuit hospitalier en manque d’oxygène, la situation évolue à nouveau. En effet, un décret adopté à la veille des grandes vacances, permet désormais aux pharmacies qui adhéreront au programme d’élargissement des compétences des officines, de signaler leur présence à l’aide d’une enseigne lumineuse indiquant « pharmacies de services » installée à côté de la traditionnelle croix verte.
Une autorisation préalable
Selon ce nouveau dispositif, les officines deviendront des relais précieux pour les cabinets médicaux. Pour adhérer au programme « pharmacies de services », les pharmaciens devront obtenir l’autorisation d’exercer leurs nouvelles activités ce qui leur permettra d’avoir accès aux dossiers électroniques des patients. Cette autorisation sera donnée par l’agence régionale de santé. En ce qui concerne les patients, ils pourront se faire vacciner ou recevoir toutes les vaccinations prises en charge par l’assurance-maladie (SSN) mais aussi, réaliser des analyses de sang qui permettront ensuite à leur médecin traitant ou leur spécialiste, de prescrire une thérapie ciblée. À condition toutefois, d’être munis d’une ordonnance rédigée par leur médecin traitant ou leur spécialiste.
Les Italiens pourront également choisir un médecin traitant ou un pédiatre pour leurs enfants en officine. Unique contrainte pour les pharmaciens : disposer d’un espace séparé de la partie commerciale… ce qui risque de pénaliser une part importante des 19 997 officines implantées sur l’ensemble du territoire italien. Pour construire un nouvel espace et acheter de nouveaux équipements, les pharmaciens devront investir et bénéficier des aides qui seront dégagées par les régions. Aides qui ne seront pas automatiques… « Le coût de l’installation et des équipements est nettement plus élevé que les gains générés par ces nouvelles activités, les chaînes de pharmacies comme Dr.Max par exemple pourront investir, ce qui ne sera pas le cas des activités familiales qui seront ultérieurement pénalisées dans un contexte déjà difficile compte tenu de la progression des grands groupes », confie un pharmacien sous couvert d’anonymat.
Une disposition plus ou moins bien accueillie
Pour la Fédération nationale des pharmaciens titulaires d’officines, Fedefarma, ce nouveau dispositif est important. Sur le plan économique, professionnel et social. « Les officines comme les médecins de famille, seront désormais conventionnées, ce qui veut dire qu’elles feront partie du système de santé nationale, contrairement aux structures qui ont besoin d’être reconnues pour devenir un fournisseur de l’assurance-maladie », estime Marco Cossolo, président de Federfarma. Une partie de la communauté médicale en revanche est très critique. « Les compétences du système de santé sont transférées à des activités commerciales et on privatise un peu plus le système », assure pour sa part le Pr. Giuseppe Remuzzi, directeur de l’institut des recherches pharmacologiques de l’hôpital Mario Negri Irccs de Milan. Mais pour une partie des médecins généralistes, ce dispositif ne peut au contraire qu’améliorer un système en perte de vitesse en raison du manque désormais chronique de médecins et de financements. « Les pharmaciens sont des professionnels de santé comme les autres, leur donner la possibilité d’épauler un circuit largement défaillant sans pour autant lui ôter toutes ses compétences, est dans l’intérêt de la population qui n’a pas toujours accès aux soins », confie le Dr Alberto Sabatini, un généraliste installé à Rome.