Décryptage des règles pour l’influenceur en santé

Par
Publié le 08/06/2023
Article réservé aux abonnés
L’avocate Morgane Morey et la juriste Clémence Deffayet sont spécialistes en droit de la santé au cabinet LPA-CGR avocats. Elles forment les équipes opérationnelles aux subtilités de la communication promotionnelle en santé et rédigent, depuis plusieurs années déjà, les contrats qui lient entreprises et influenceurs.

Le Quotidien du pharmacien.- Médicaments, dispositifs médicaux, compléments alimentaires… Quels sont les produits que les influenceurs peuvent promouvoir ?

Morgane Morey et Clémence Deffayet.- Les règles de publicité s’appliquent aux influenceurs. Pour les médicaments, la publicité auprès du public est autorisée uniquement pour ceux qui ne sont pas soumis à prescription médicale obligatoire et qui ne sont pas remboursables. À condition toutefois que l'autorisation de mise sur le marché (AMM) ne comporte pas d'interdiction ou de restriction en raison d'un risque possible pour la santé publique. Par dérogation, les vaccins peuvent faire l’objet d’une promotion s’ils figurent sur une liste établie pour des motifs de santé publique par arrêté du ministre chargé de la santé. Concernant les dispositifs médicaux (DM) : s’ils sont remboursables, la publicité auprès du grand public est possible uniquement s’il s’agit de DM de classes I et IIa ; s’ils sont non remboursables, la publicité auprès du grand public est possible. Elle est soumise à un contrôle a priori s’ils sont inscrits sur la liste des DM présentant un risque important pour la santé humaine. Par ailleurs, la publicité auprès du public portant sur les dispositifs d’autodiagnostic est soumise à un contrôle a priori et nécessite le dépôt d’une demande d’autorisation préalable à l’ANSM. Pour les compléments alimentaires, les allégations utilisées doivent être listées et autorisées par la réglementation européenne. À noter qu’il existe des interdits spécifiques : par exemple lorsqu’on promeut un lait infantile, on ne peut pas dire qu’il est aussi bénéfique que le lait maternel.

La nouvelle loi de lutte contre les dérives des influences prévoit des interdictions spécifiques de promotion pour la chirurgie esthétique, « l’abstention thérapeutique » et les produits contenant de la nicotine. Quelles sont les sanctions encourues ?

La violation de ces dispositions est punie de deux ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende. Est également encourue la peine d’interdiction, définitive ou provisoire, d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise.

Des dispositions spécifiques s’appliquent-elles lorsque l’influenceur est aussi professionnel de santé ?

Un professionnel de santé suscitera moins d’indulgence des juges. De plus, si c’est une profession réglementée, il doit respecter un code de déontologie. Par exemple, un médecin ne peut faire de diagnostic en dehors de son cabinet sinon c’est de la médecine foraine et c’est interdit. Il ne peut dire tout et n’importe quoi au risque d’être accusé de charlatanisme, etc. Il est donc susceptible d’écoper, en sus, de sanctions disciplinaires.

Propos recueillis par M. M.

Source : Le Quotidien du Pharmacien