Au cœur de la représentation nationale, le docteur Cyrille Isaac-Sibille s’est fait remarquer par la profession, en déposant un amendement proposant « l’interdiction de tout groupement, société coopérative ou réseau constitué entre officines ».
Dans cet amendement publié le 18 octobre, le député de la 12e circonscription du Rhône, otorhinolaryngologiste de profession, affirmait que « les groupements pharmaceutiques, en cherchant à mutualiser les ressources et à négocier des conditions avantageuses, favorisent essentiellement les grandes officines au détriment des plus petites », et « menacent la diversité du tissu officinal, augmentant le risque de marginalisation des petites pharmacies indépendantes ». Jugeant que les groupements représentent « un maillon intermédiaire non nécessaire dans la chaîne de distribution » et « ne remplissent plus aucune fonction véritablement utile », le député du mouvement démocrate considérait que leur interdiction pouvait « restaurer une distribution pharmaceutique plus équitable et respectueuse des impératifs de santé publique ».
Les groupements vent debout
Le jour même, la profession a réagi à l’unisson, dénonçant une proposition « très baroque », selon le président de la Fédération des Syndicats Pharmaceutiques de France (FSPF), Philippe Besset. La chambre syndicale des groupements de pharmacies, Federgy, a quant à elle exprimé « sa stupéfaction et son incompréhension » devant la proposition du député, l’accusant de « ne pas connaître le fonctionnement des groupements et leur rôle dans l’écosystème officinal ». Son président Alain Grollaud n’a ainsi pas manqué de rappeler que 94 % des titulaires de pharmacies adhèrent à un groupement et que 98 % en sont satisfaits.
La mobilisation de la profession a-t-elle porté ses fruits ? À voir. L’amendement, jugé irrecevable dès le 21 octobre en vertu de l’article 98 du règlement de l’assemblée nationale (qui stipule que les amendements ne peuvent porter que sur un seul article), a été rejeté pour une question de forme, et non de fond. Preuve en est, l’amendement a été publié sous une nouvelle forme le 28 octobre, inchangé.
Contacté par « Le Quotidien du pharmacien », Laurent Filoche, président de Pharmacorp et de l'UDGPO (Union des Groupements de Pharmaciens d'Officine), s’est dit « estomaqué » par cet amendement : « Il faut avant tout savoir qui a soufflé l’idée à ce député. Je refuse de croire qu’il n’est pas téléguidé. La question étant par qui ? »
Un député déjà pointé du doigt
Car Cyrille Isaac-Sibille n’est pas un illustre inconnu. En 2018, le député avait été critiqué par LFI, qui lui reprochait ses soutiens répétés pour des mesures favorables aux laboratoires, alors même que celui-ci détenait des actions dans 34 grands groupes, dont 92 chez Sanofi. Le député avait également perçu plusieurs milliers d’euros de cadeaux de leur part. Cyrille Isaac-Sibille avait répondu « n’avoir rien à se reprocher », précisant que ses actions Sanofi étaient gérées par sa banque via un PEA et que tous ses cadeaux étaient déclarés dans la base publique « Transparence Santé ». Reste à voir si ces explications convainquent aujourd’hui les pharmaciens…
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