« Lors de la formation, nous pouvions nous entraîner soit sur un bras factice, soit entre nous, se souvient Claude Breuil, pharmacienne adjointe à Belley (Ain). Nous nous sommes tous entraînés in vivo, en nous mettant en binômes et en réalisant le geste avec une solution d’eau stérile. Cela nous a permis de nous rendre compte que c’était très facile et pas du tout douloureux pour le patient. Ainsi, lorsque j’ai vacciné de vrais patients, je n’ai pas eu d’appréhension. D’ailleurs, les patients eux-mêmes étaient très en confiance. Il y a eu un fort battage médiatique, donc ils savaient qu’ils pouvaient se faire vacciner en pharmacie. »
Néanmoins, hors de question de prendre le travail des médecins ou des infirmières ! « Nous leur proposions la vaccination seulement s’ils n’avaient pas la possibilité de la faire réaliser par le médecin ou l’infirmière », souligne Claude Breuil. Pour elle, cette nouvelle mission a été une bonne expérience. « Cela a permis un échange différent avec les patients, car nous les gardions à l’officine un petit moment après la vaccination pour être sûrs qu’ils ne fassent pas de malaise. Cela permettait de renforcer le lien avec eux, au-delà de la délivrance de leur prescription habituelle. Ils pouvaient nous parler de leur vie, de leurs soucis, etc. »
Des patients très contents
Dans sa pharmacie, une centaine de vaccinations ont été réalisées. Elle-même estime en avoir fait une cinquantaine. « Les patients étaient très contents, ils trouvaient cela très pratique de pouvoir se faire vacciner tout de suite. Nous sommes dans une zone semi-rurale, donc s’il faut aller chez le médecin cela exige des déplacements à chaque fois. Nous étions vraiment dans la démarche d’augmenter la couverture vaccinale antigrippale chez les personnes fragiles. Une cliente m’a même dit : « je vous remercie de m’avoir vaccinée, grâce à vous je n’ai pas eu la grippe ! » »
De son côté, Ingrid Lafaye, adjointe à Neuville-sur-Saône (Rhône) note qu’il a fallu s’organiser pour pouvoir prendre en charge la vaccination à la pharmacie. « Au niveau pratique, cela nous prenait beaucoup de temps, donc nous avons dû prendre des rendez-vous et faire revenir les patients, explique-t-elle. J’ai dû en vacciner une vingtaine moi-même et dans la pharmacie nous étions quatre à vacciner et nous en avons réalisé plus d’une centaine. »
Si certains médecins on pu se montrer réticents face à cette nouvelle mission des pharmaciens, d’autres l’ont plutôt encouragée. « Certains patients nous ont rapporté que leur médecin leur avait dit : « Allez à la pharmacie pour vous faire vacciner contre la grippe, moi je n’ai pas le temps ! » Je pense que les infirmières ont été plus réticentes que les médecins. Nous, nous avons trouvé cela très bien, du moment qu’on ne prend le travail de personne ! »
Une mission qui valorise la profession
Pour sa part, Marie Tixier, adjointe à Lyon avait un peu d'appréhension lors de sa première piqûre sur un patient. « Mais je suis tombée sur un patient très gentil, qui n’était pas du tout inquiet. C’était un patient que je connaissais bien et cela m’a aidée pour le premier, estime-t-elle. Il m’a dit qu’il n’avait pas eu mal du tout, qu’il n’avait rien senti. » Dans sa pharmacie, 120 personnes ont été vaccinées pendant la campagne. « J’ai vacciné moi-même une soixantaine de personnes », calcule Marie Tixier. Là encore, les réactions des patients étaient très positives. « Les patients étaient contents, ils trouvaient ça pratique. Dans la mesure du possible, nous avons essayé de faire les vaccinations tout de suite et s’il y avait beaucoup de monde au comptoir, nous leur demandions de revenir l’après-midi. » Pour elle, cette nouvelle mission « valorise la profession et nos compétences. Cela nous rapproche des patients, car c’est une autre relation qu’au comptoir », apprécie-t-elle.
Elle note que « cela permet d’engager le dialogue sur la vaccination, car il y a beaucoup de gens qui sont anti-vaccins. Cela nous donne l’occasion d’expliquer pourquoi c’est important de se faire vacciner ». Elle a trouvé cette expérience « extrêmement positive, car nous avons quand même aidé à augmenter un peu la couverture vaccinale. Nous avons beaucoup sensibilisé les patients aux vaccins, ce qui a contribué à leur redonner confiance dans la vaccination. D’habitude, nous avons beaucoup de patients qui achètent les vaccins et nous les rapportent non utilisés en avril. La vaccination en officine a permis d’éviter cela ». Elle indique qu’elle revaccinera l’année prochaine, tout en espérant que la vaccination sera étendue. « Il faudrait que nous puissions vacciner les adultes qui n’ont jamais été vaccinés. Le tout premier patient qui m’a demandé, le premier jour où nous pouvions vacciner, était un homme de 45 ans qui voulait acheter le vaccin et se faire vacciner dans la foulée. Quand je lui ai expliqué que je ne pouvais pas car il n’avait ni bon de prise en charge, ni ordonnance et qu’il ne rentrait pas dans le cadre de l’expérimentation, il est reparti en disant qu’il n’avait pas le temps et qu’il ne se ferait pas vacciner ! »
« Il faudrait que nous puissions vacciner tout le monde, du jeune adulte jusqu’à 90 ans, renchérit Laurianne Boisson, adjointe à Saint-Bonnet-le-Château (Loire). Si on vaccinait les jeunes adultes de 40-50 ans, il y aurait moins de circulation du virus. » Environ 75 vaccinations ont été effectuées dans son officine, située en milieu rural.
Reprendre confiance dans la vaccination
« Proportionnellement, nous avons fait relativement peu de vaccinations par rapport à d’autres, sur les 950 vaccins délivrés. Quand nous délivrions un vaccin, nous laissions les gens nous demander la vaccination pour respecter leur choix de se faire vacciner par le médecin ou l’infirmier. Nous avons tous les jours au moins un ou deux infirmiers qui viennent à la pharmacie chercher des ordonnances et nous travaillons en bonne intelligence avec eux. » Laurianne Boisson estime avoir vacciné entre quinze et vingt personnes. « La première fois que j’ai vacciné, j’ai eu un petit coup de stress, reconnaît-elle. Mais finalement ça s’est bien passé. Vu que nous étions bien formés, nous arrivions face au patient en connaissant bien le geste. J’avais suivi une formation d’une journée à la faculté de Lyon. Toute la matinée c’était sur le vaccin avec un professeur d’immunologie. L’après-midi, nous nous entraînions sur un mannequin et sur des balles en mousse pour piquer, avec des infirmières qui nous montraient le geste. J’appréhendais un peu le côté piqûre, mais j’ai été surprise car tout s’est bien passé. » Elle note que « les patients étaient très demandeurs car nous n’avions pas d’horaires. Ils pouvaient passer quand ils voulaient et il y avait toujours un pharmacien qui pouvait les vacciner. Ils n’avaient pas besoin de prendre rendez-vous ». Comme Marie Tixier, elle a constaté que la vaccination à l’officine permettait aussi aux patients de reprendre confiance dans la vaccination. Pour tous ces adjoints, l’expérience a été une réussite, qu’ils comptent bien renouveler lors de la prochaine campagne…
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